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2022.06.23 | Rolling Stones impro à Villeneuve-la-Garenne

une autre date au hasard :
2007.02.03 | raconter Dylan à la radio

Je n’étais jamais allé à Villeneuve-la-Garenne : ville enclavée entre deux puissantes voisines, Gennevilliers et Saint-Denis, et le caprice des boucles de Seine qui découpe si bizarrement les départements. Prendre à Mairie de Saint-Ouen le bus 137, et — zeugme — prendre patience, aussi. Mais des arbres, des avenues, puis la Caravelle. On longe en venant le Qwartz, énorme cube tombé du ciel en blanc et rouge, 400 mètres de façade et 8 étages, des hypermarchés, 150 boutiques dans les galeries, parkings et multiplex cinéma : comment n’y pas avaler la ville ? Puis ce qu’on dit pudiquement recomposition sociale. S’obstiner pourtant, elles et eux. Une salle de cinéma qui subsiste des années culture décentralisée ? On la consacre aux enfants, de la maternelle et collège et les souvenirs seront pour toujours, que les écrans commerciaux ou miniaturisés ne produisent pas, sinon leur flux. Reste qu’il faut tenir ça, et ça peut sembler au visiteur que c’est à bout de bras, respect donc à mes accueillants, et Sandrine Hertig et Luc Pitois tout d’abord, ou Anne, qui est venue ici depuis la Ferme du bonheur à Nanterre, autre initiative devenue si fragile qu’on enrage. Longue série depuis toujours sur mon site : avant lecture, intervention, atelier, vaincre la timidité (plutôt que la trouille, mais la frontière est mince) en documentant le lieu. Couloirs, géométries, la salle que tu ne verras plus une fois tout lancé. Pour un auteur, intervenir dans une salle de cinéma ; jouer avec l’écran et ce qu’on lance depuis l’ordi ; s’équiper du petit casque agrippé au menton qui vous permet de vous glisser dans l’écran même au milieu de ce que vous projetez. En 1h20, les Stones, à peine passé les étapes arbitraires d’enfances que rien ne préparait à la catalyse symbolique. Se frayer un tunnel, veiller à ce qu’il résonne sur autres époques, et ce léger tremblement qu’on voudrait pour le présent. Et puis Jean-Pierre L. : figurez-vous que, lycéen, on vous envoie en séjour chez un correspondant à Cheltenham, et que sa soeur prend des leçons de piano chez une madame Jones, dont le fils, à peine plus vieux que vous, s’appelle Brian. Et que la liaison avec Brian, sanctifiée par Cheltenham, durera jusqu’à ce jour de 1969, quand l’homme atterrit sur la lune, avec Bill Wyman et Charlie Watts mais pas Jagger ni Richards, vous l’accompagnez à sa tombe. Et que, 110 concerts plus tard, ce lien avec Brian vous vaut toujours les entrées dans les tout premiers sas, cercle hors du temps. Ça tombe bien, puisque c’est du temps qu’on voulait principalement parler, et de la musique. Reste que tu n’aurais jamais même imaginé connaître directement quelqu’un qui avait connu, et bien avant les Stones même, l’énigme Brian Jones.

 

 


François Bon © Tiers Livre Éditeur, mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 23 juin 2022
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