
contribution de Daniel Bourrion
Daniel Bourrion | Nous vivons dessous
Nous vivons dessous, dans ses tripes, dans ses tunnels-artères, dans son coeur de terre noire (ce très vague souvenir que nous avons perdu) et puis de béton gris comme nos âmes sans fond. Nous ne sortons jamais. Nous craignons la lumière, et le reflet de nos reflets sur les façades-miroirs, cette sorte d’infini qui ne renvoie à rien.
Nous vivons dessous. Nous ne dormons jamais, ou alors par paliers, pour descendre encore plus, vers le centre du monde, d’où d’aucuns sont allés, à ce qu’ils nous racontent, que nous ne croyons pas. Nous n’avons pas de rêves, ils sont eux morts aussi avec nos vies d’avant, nos vies dans la lumière.
Nous vivons dessous, de ce qu’elle vomit à longueur de jour et tout en-dedans d’elle sans cesser un instant, et grosse tellement d’elle, qu’elle s’écrase à chaque pas sous le poids sans répit de sa propre débauche.
Nous vivons dessous, nichés dans nos alcôves, patients, à guetter le jour où le soleil ne se lèvera pas sur les grandes dames lisses et où la ville sera mort d’elle, et le dessus dessous.
1ère mise en ligne et dernière modification le 4 mai 2011
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