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2016.12.13 | je ne veux pas devenir

On s’attend à ce que les petits êtres en pleine découverte et étonnement de leur langage, et du rapport qu’a ce langage aux choses, aient une phase où on souhaite avant tout devenir pompier ou pilote d’avion (version masculine). On considère les déterminants, on oublie le verbe qu’on promulgue pour les appeler. Ce même matin, l’ami A., en charge d’un peu tout à l’école et bien plus que son statut (ce qu’il est donc devenu de directeur des études et coordinateur de la recherche, s’en vient comme chaque année à même date en quête de sujets à donner à nos candidats au concours d’entrée – il en faut un par demi-journée, on les accueille par cette demi-heure de réflexion libre mais écrite, dans le bref jury de 20 minutes qui suivra ce ne sera pas déterminant, mais ça aide énorme pour dépister curiosités, insolences, singularités. Ce sont des sujets qui ne doivent pas être trop techniques ni théoriques, plutôt ouvrir à digression comme le pratique Montaigne. L’an passé je me souviens que « De la couleur orange » avait pas mal fonctionné. Son mail me parvient au même moment, pratiquement, que la réponse à la question de savoir s’il est préférable de s’orienter vers pompier ou pilote d’avion : – Je ne veux pas devenir. Je la porte depuis plus de 24h. Je suis devenu quoi, moi, en fait ? Et il y a quoi, au bout du devenir ? On en anticipe quoi, et quoi s’en impose à contre de vous-même. Et si j’avais voulu devenir, j’aurais choisi quoi. Je n’ai pas vraiment de réponse. Ou même vraiment pas. L’usage intransitif des verbes dérange souvent. Serait peut-être bien qu’à Noël je rouvre mes vieux Hegel. (Photo Cergy nuit, vidéo en préparation.)


François Bon © Tiers Livre Éditeur, mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 14 décembre 2016
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