Le double voyage #9 Le Grand Horloger

Le Grand Horloger me raconte l’histoire d’un gardien de phare de la pointe du Raz et d’un berger de l’Auloueilh dans les estives pyrénéennes. Il précise qu’il n’a pas tous les détails concernant les points cardinaux, il est sûr de la zone ouest mais il ne peut pas expliquer le décalage géographique entre le nord et le sud, l’océan et les montagnes, son affaire c’est le temps. Il dit que l’attirance pour l’ouest est une chose certaine mais que le choix entre la mer et la montagne reste incertain. Il pense que le gardien de phare a pris un jour sa tour de pierre pour un pic rocailleux de la haute montagne, qu’il a vu sur l’eau la belle laine duveteuse des brebis et qu’il a entendu l’appel de la forêt. Je l’interromps pour dire que je n’en crois pas un mot. Il répond que c’est mon affaire et il continue comme ça : le gardien de phare n’avait jamais vu la neige qui s’envole en poudre nacrée l’hiver, qui s’étire en ruisseaux et fleurit en prairies au printemps. Il n’avait jamais tourné son regard que vers l’eau sombre et le reflet des abysses vertigineux. Dans cette histoire, il est aussi question de ce berger à un moment prêt à tout abandonner pour suivre le chemin d’un égaré taciturne, et d’un estuaire, d’un endroit entre terre et mer, où se mêlent nos mystères et nos différences. On ne sait pas où les personnages se rejoignent car tous les repères géographiques sont flous dans ce voyage. Mais on sait quand. Le grand Horloger assure qu’ils se sont glissés dans une faille de la temporalité, qu’on l’appelle comme on voudra. Mais il précise que c’est maintenant.

A propos de Olivia Scélo

Enseignante. Bordeaux. À la recherche d'une gymnastique régulière d'écriture.

4 commentaires à propos de “Le double voyage #9 Le Grand Horloger”

  1. oh bien… vraiment pile dans cet espace d’invention de conte que peut permettre ces formes imbriquées, et comme le contexte fournit l’appui à toute liberté allégorique…

  2. Oui, je me rends compte que c’est vers l’imaginaire que me conduit de plus en plus ce voyage… Et que de stimulations dans ces consignes !