#histoire #10 | Objection de conscience

Oui voilà on le sait trop comme ils reviennent de l’enfer : des gueules cassées des corps épuisés décharnés désarticulés écrasés lacérés en mille éclats de chair éparpillée,

Voilà des têtes :  pleines de vide et de trop plein qui chutent dévalent des torrents de souvenirs de peurs incontrôlées incontrôlables insupportables de gestes regrets de geste vengeance de gestes sauve qui peut s’immolant sous des cascades d’angoisses ankylosantes tétanisantes mémorisées pour l’éternité,

Voilà des visages : boursouflés de douleur crispés de terreur portant les traces de coups du sort de coups de poing de coupes tranchantes et encore sanguinolentes formes désincarnées dérivant dans un plus rien à voir avec ce monde,

Voilà des yeux :  hagards aux vitraux embués des yeux qui ne rient plus qui n’ont peut-être jamais sourient qui ont vu trop d’horreurs ne pouvant plus rien regarder admirer contempler,

Voilà des bouches : qui tombent se fendent à force de se cogner sur des douleurs intérieures indicibles des bouches qui avalent dévorant n’importe quoi dans des ventres restés trop longtemps noués des bouches fermées cadenassées,

Voilà des crânes : garnis de cheveux brulés écrasés des maigres touffes éparpillées des crânes tellement nus offrant à voir ce qu’il y a dedans ce qu’il y reste,

Voilà des trous : dans la tête visibles ou invisibles béants ou minuscules des trous comme des crevasses des gouffres des trous de mémoire s’acharnant à gommer gratter effacer, 

Oui voilà des hommes : fracassés par la guerre par une de ces sales guerres parce qu’il n’existe aucune guerre propre sur elle sous elle devant derrière elle,

Non voilà pour ces morts vivants revenus et pour la mémoire de ceux qui sont à jamais tombés il ne sera pas question devant ce carnage ces mutilations ces vies saccagées d’accepter de perdre nos enfants dans une nouvelle hystérie meurtrière programmée,

Oui voilà aujourd’hui des porteurs de lumière qui ayant donné la vie la protègent jours après nuits et façonnant les sentiers d’un nouveau monde bâtissent des remparts infranchissables des digues insubmersibles dont l’invisible puissance réduira le moment voulu en cendres déjà froides ces stupides velléités la liberté et la paix marchant ensemble objectant en conscience dans les cœurs et bien ailleurs le droit de mourir pour des idées d’accord mais de mort lente,  

Vous voilà ô vous les boutefeux ô vous les bons apôtres Mourez donc les premiers nous vous cédons le pas Mais de grâce morbleu ! laissez vivre les autres! *

*Mourir pour des idées, Georges Brassens

A propos de Eve F.

Rédige des assignations et des conclusions, défend le veuf et l'orpheline, écrit sur le Droit et son envers, la Justice et ses travers, le bien-être et son contraire, les hommes et pas que, le bruit du monde et ses silences, aussi.

Une réponse à “#histoire #10 | Objection de conscience”

  1. J’aime beaucoup la manière dont tu as utilisé la consigne, les voilà pour décrire ces chairs à canon, morts vivants, et ceux à jamais tombés, c’est poignant.
    Sans parvenir à vraiment me l’expliquer, j’aime particulièrement : parce qu’il n’existe aucune guerre propre sur elle sous elle devant derrière elle,

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