#boost #12 | Micolet, de la coupe et du vers en auberge

– sommaire général du cycle;
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De la prose narrative comme suite organinsée et rythmique d’éléments discontinus, images à focales variables, fragments de visages, exploration spatiale d’un lieu : et s’en remettre aujourd’hui à une singulière expérience de poésie pour l’exacerber.

L’expérience poésie convoquée : celle de Hervé Micolet, dans Les cavales, 1 en 2023, 2 en 2025. Une composition en suite de triptyques ou diptyques, parfois séquences de 4 vers ensemble ou d’un seul vers, mais chacune de ces unités comme brique élémentaire des chants séparés qui forment le livre.

La force de Cavales, 1 par le thème principal d’ouverture et d’exploration, le deuil d’une mère. Et, dans la symphonie que compose ce livre d’ampleur, un chapitre qui fonctionne comme d’une sorte de repos (pas sûr que l’auteur acquiesce), la simplicité explorée d’une auberge rurale, hameau de montagne, dont on donne même l’emplacement précis, Salvizinet, et l’enseigne, «chez Nicole».

Peut-être parce que chacun·e d’entre nous a dans son parcours, à hauteur d’enfance ou dans le présent même (celles·ceux qui suivent mon projet Rabelais savent le rôle qu’y a joué le Café de la Gare à Beuxes), avec table d’hôte, parking et cuisine, terrasse ou pas (La Cabane, dans le Cézallier, non, pas de terrasse — mais un poste distribution gas-oil oui), et une salle réservée aux accueils mariage ou banquets ou après enterrements, et la mémoire des événements par les décorations qui survivent, comme, dans la salle principale, les flashes sur objets et ustensiles ou couverts saisis de tout près comme de visages, gestes, bruits et voix.

J’insiste: comme un moment de légèreté et d’humanité simple (le mot est dans le texte) au sein d’une symphonie beaucoup plus lyrique, même si sur le même dispositif d’assemblage rythmique, qui fait de la brique élémentaire du texte non pas le vers mais leur reformation en triptyque ou diptyque, ou quatre vers ou un seul. `

Et voici ce qui m’a décidé à cette proposition : Hervé Micolet (je n’en sais pas la raison, ça m’interroge au plus vif mais ne me concerne pas) a repris la publication de livres après une coupure de vingt ans. Et, quand paraît Cavales, 2, la surprise d’y trouver de nouveau un chapitre «Chez Nicole»: pourquoi pas, puisqu’un des éléments fournis c’est qu’à chaque été on repasse par la petite auberge, le hameau et la terrasse. Le même texte ? Il m’a fallu rouvrir le 1 pour vérifier, parce que je pariais sur une réécriture. Oui, il y a réécriture, mais justement elle ne concerne que la coupe et l’arrangement des ensembles de vers — la suite des mots, des images, la spatialité de l’exploration sont strictement les mêmes.

Et puis cette étrange note de l’auteur, à la fin du 2 : en cas de réédition ou retirage du 1, ce chapitre en sera retiré (ce qui me choque extrêmement). Et pourquoi pas, selon ce qu’établira cette série, ce même moment de l’auberge, sa respiration particulière, comme élément récurrent, recomposé pourquoi pas, comme de toute façon on revient à ce même lieu ?

Mais, pour cette proposition #12, gardons simplement la forme. Ce lieu, et les rythmique non pas des vers, mais de ces micro-ensembles de vers regroupés en suite de triptyques, eux-mêmes découplés en diptyques ou quadriptyques (ça existe, le mot ?) comme si chaque brique devenait mot image, ou coupe rythmique comme nous l’utilisons en prose, dans le bloc paragraphe.

Commencer par établir soi-même la liste personnelle des lieux qui rentreraient dans cette niche, par régions ou par étapes biographiques ? Parce que, probablement, ce sont des lieux à la fois structurés par leur fonction sociale, mais dans lesquels ou par lesquels on procède à des rituels privés, et qui rejoignent en soi une mémoire avec fond d’intime?

Danger pour nous : la force d’Hervé Micolet, la maturité de son travail, c’est de surplomber toute impression de «poétisation» et ça doit être une injonction pour nous : s’en tenir à la précision, encore plus de précision, sachant que la discontinuité, un à l’intérieur des briques triptyques (dominant), diptyques ou quadriptyques (en alternance et répons) autorise pour chaque image la spécificité de thème et de focale, et qu’est seulement le rythme, le rytm sec, la battue qui confère au texte ce qui fait qu’on le nomme poésie.

Gardez-vous donc avant tout de l’interrogation «poésie», et moi ce n’est pas mon domaine. Tenez vous-en à l’exploration du lieu, et cette composition rythmique des images, toujours en rupture thématique (voix, visages, lumières, déplacements intérieurs, objets et décors, strates de souvenirs) comme en rupture de grossissements (ces écarts de focale on les a plusieurs fois travaillé séparément).

La seule piste: le secret (qui restera secret) du lien affectif à ce lieu précis. Et bien sûr lire l’extrait proposé.

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