nocturnes de la BU d’Angers, 12 | le rideau des rêves

encore à partir d’Henri Michaux, notes sur comment on rêve, et des "lieux inexprimables" du rêve


Ce soir, travaillant sur le rêve, pas possible de mettre en ligne un exposé technique. Pour écrire sur ou dans ou avec le rêve, besoin que ça passe par l’impro.

Faire le point avec où on en est soi-même du rêve.

Donc je parlerai en roue libre pendant 40 minutes, et ce ne sera pas plus, pour positionner un certain nombre de lanceurs.

Point clair, le point d’arrivée : il ne s’agit de produire un récit de rêve, surtout pas. Toute la difficulté sera de tenir l’écriture en amont : écriture qui regarde le rêve, décrit notre rapport au rêve, notre travail du rêve. C’est la fragmentation de ces notes qui va recréer un texte lui-même non pas onirique, mais lié à ce que nous trouvons par le rêve de signature, territoire, façon pour notre esthétique.

Dans cette improvisation, je passerai par quelques points fixes :
 archéologie de la littérature de rêve et de divination, pas de civilisations anciennes qui y échappent, statut prescriptif du rêve sur le réel ;
 permanence du récit de rêve dans totalité historique de notre littérature – depuis Rabelais (ça s’appelle Le Tiers Livre !), jusqu’aux grandes fondations du romantisme, Jean-Paul chez les voisins, ou Nerval chez nous.
 sera développé l’exemple complexe de Baudelaire : Rêve parisien dans les Fleurs du mal, texte abstrait, reconstruit, minéral et géométrique, en opposition aux 8 ou 10 rêves que rassemble la Correspondance, notamment celui commenté par Michel Butor, et la frontière du rêve dans les Poëmes en prose, voir Onéirocritie – strict parallèle de tout cela avec Kafka sera évoqué aussi ;
 constat que la littérature faite de récits de rêve est une impasse en tant que telle, voir La boutique obscure de Perec ;
 traversée de quelques fonctionnements élémentaires du rêve : rappels sur les phases de sommeil et rôle du rêve, sa spécificité selon ces phases, les typologies communes (rêves de vol, dents qui tombent, animaux) ou moins commune (se voir dormir, rapport aux morts), rapport aussi aux perceptions sensorielles, rêves de réveil, perceptions auditives, rêves liés à l’angoisse propre à chaque métier – ô le rêve de l’animateur d’atelier d’écriture qui a oublié ses photocopies ;
 aperçu de quelques fonctionnements plus énigmatiques du rêve : le rêve récurrent, le rêve prémonitoire, les dédoublements de conscience, le réel qui est exactement ce qu’on a rêvé ;
 quelques notions de ce qu’on travaille actuellement sur le rêve, notamment sa recomposition linéaire lorsqu’on se le représente ;
 important : le travail du rêve – des Manifestes du surréalisme à Carlos Castaneda, quelques exercices archétypes et comment les maîtriser (arrêter le rêve, se retourner dans son rêve, voir ses mains dans son rêve, problématiques liées à la notation et à l’écriture du rêve).

Ensuite, Michaux. Bref positionnement : après les 3 livres « Drogue », l’expérience psychiatrique directe sur les dessins des patients, et cette limite-là explorée pour lui-même, c’est la rédaction de Façons d’endormi, façon d’éveillé texte qui regorge aussi de pistes pour écrire sur, dans, avec le rêve.

Et tout un jaillissement de titres, qui reprennent l’ancien Lieux inexprimables, avec Lieux lointains, Lieux sur une planète petite, Portes donnant sur le feu...

Dans Le rideau des rêves, c’est à cela que s’attelle Michaux : les perceptions, les objets en mouvements, la reconnaissance des êtres, pourquoi on rêve en noir et blanc, etc.

Alors on débarrasse le rêve du récit du rêve, et on ne cherche que les lieux qu’on y a rencontrés. On les écrit depuis le rêve, mais on ne les écrit pas en tant que rêve. Alors peut-être on peut ancrer le littéraire – comme le fait depuis si longtemps la peinture – dans ce territoire de fiction, à la fois d’éléments réels et d’éléments symboliques, d’où émergeront les narrations les plus singulières – mais en 40’ je devrai m’interdire là d’évoquer Poe et Lovecraft.

Donc : on part à la rencontre de tout ce qui concerne pour nous le rêve, sous forme d’un journal, d’un carnet de notes, de fragments. C’est la machine, le moteur. Cette marche d’approche va nous délivrer des lieux, des chambres, des couloirs, des maisons, des appartements vides, des villes en surplomb, des grossissements de villages d’enfance.

Ce sont ces lieux qui sont l’objet de notre quête. Vous reporter à vos propres livres de Michaux, ô vous qui nous rejoignez en ligne, pour les textes indiqués ci-dessus.


responsable publication François Bon © Tiers Livre Éditeur, cf mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 17 février 2011
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