ces tambours à littérature

vraiment l’idéal pour une marche neuve de la littérature d’action dans les villes, pensait-on


Tout avait commencé en relisant le fameux Dépeupleur de Beckett, variation sur le vieux jeu enfantin des Snakes and ladders : un cylindre dont les dimensions avaient été définitivement fixées par l’auteur.

Et pas au hasard, non, pas au hasard.

On en avait essayé, des maisons de la poésie, des maisons des écrivains, des maisons de la littérature, des maisons Machin ou maisons Truc, rien nulle part n’avait jamais été concluant.

Ici, rien que le cylindre. On réservait sur Internet, l’auteur d’un côté, les spectateurs de l’autre. Pas de bureau, pas de coulisses ni loges. On entrait, il y avait l’auteur, des éclairages, le cylindre, les niches pour s’installer (selon Beckett toujours), et la lecture commençait.

La révolution, c’est qu’on pouvait réserver aussi dans la journée, et quand bien même on n’avait pas publié de livre : on disposait à soi seul du cylindre pour écrire, assis par terre avec son ordinateur, réfugié dans une niche pour méditer, avec juste la vibration de la ville traversant les parois de ciment mince, ou bien tenter ses improvisations à haute voix.

Il y avait une condition, une seule, pour les lectures comme pour les temps d’écriture : tout cela était visible à distance, en permanence, sur un site Internet qui présentait l’ensemble des tambours, de toutes les villes, partout au monde.

On disait que ça avait commencé ici, à Londres, non pas à cause de Beckett et son Dépeupleur, mais parce que c’était une ville de haute tradition des tambours : qu’ici, dans ces rues, dans la gare, avaient marché Charlie Watts (son père y était livreur), Ginger Baker, Keith Moon, Mitch Mitchell, John Bonham et bien d’autres.

Mais on en avait installé dans de nombreux autres points peuplés de la ville, et désormais dans de nombreux autres pays.

Bien sûr, cela ne sauverait pas la littérature. Mais au moins recommençait-on à y croire.

 

 


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1ère mise en ligne et dernière modification le 14 septembre 2013
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