#40 jours #13 | lumière noire

L’appât luisant■là pas du tout■pas si près de voir■pas prêt à voir cette peinture noire sur toile bloc■sans apprêt blanc ocre sur fibres■pas prêt à me prendre ce noir dans la rétine un noir basalte qui absorbe tout en bas et fuse sur des lignes-empreintes de lumière des empreintes de peau des couteaux qui ont tranché dans le sombre■pas prêt de glisser sur ce noir en perspective qui m’accroche me dérive hors du bloc■pas trop près pour voir ces triptyques de magie noire qui envoûtent vous submergent vous empoignent à la gorge exténue le corps vide l’âme noir formule vociférée écrite à la hâte sur des chaires embaumées■pas des pas des pas de géants à sculpter ces palais vides de stèles noir glace sans tain espaces sans couleur un noir brossé sur une tranche■pas de pâtes sèches mais des empattements gras de noir spéculaire qui sue et se colle sur votre front dégouline dans vos oreilles ferme vos paupières à jamais dans le noir■pas si noir, mais de l’or, mais de l’or noir pas de l’or, mais du bois d’ébène de l’orée des bois au cœur d’ébène des loups qui surgissent et vous digèrent sans gloire sans vie dans le noir■passé ce noir ce noir indélébile qui porte à l’estomac vous secoue vous éblouit voir passer ce mirage sur ces fluides bitumeux■pas du noir d’écorce du noir terrestre du noir du magma vomi à cœur pas du bois de l’écorce fossilisée des cendres noires, mais des planches dans la nuit qui s’élèvent noires au nadir qui vibrent à l’autre bout de la surface qui vibrent sur toute la surface vous envoient des messages chaotiques du chaos des origines des surfaces sombres pour la rétine■pas prêt à toucher cette pellicule qui me strie me déchire je ne sais pas pourquoi ce noir me blesse jaillit sur moi me crie sur moi inarticulé■pas les cent mais deux cents pas pour prendre le pas pour prendre le recul cérémoniel du sang qui coule sombre sur ces surfaces plates mauvais sang indéchiffrable des signes qui s’effacent sur des superficies de lumière■ce pas ça n’absorbe pas ça absorbe tout et ici la lumière se résorbe la lumière s’étouffe sur toute une partie charbonnée encore des restes cramés qui réfléchissent sur des traits des lignes de cheveux des traits passages de brosses de brosse à dents de brosse à cheveux des blaireaux des peignes des traces plus que des traces calcinées des lignes des chemins des traits des lignes de chemin de fer des points brûlés l’envie de hurler■

À Pierre Soulages

A propos de Michael Saludo

Vis, écris et travaille à Angoulême. J'anime des ateliers d'écriture en lien avec le cinéma.

14 commentaires à propos de “#40 jours #13 | lumière noire”

  1. Terrible !
    Et ces carrés noirs qui découpent, qui strient, qui font que ça pulse !
    Merci et bravo !

  2. ■■■■ Pixels Soulages !!! On voit tout ■■■■dedans sans le reflet de toutes les perplexités de passage… Souvenir au noir… Musée Soulages Rodez- Retrospective – ■■■■Téléportation télépathique à Conques – Billes de verre transformées en vitraux -■■■■ Perplexités de passage encore – ■■■■L’étonnement des visiteurs comme spectacle sonore et visuel – ■■■■ Ben, oui , le noir est multicolore, il outre le noir, l’outre-noir,■■■■ Madame, Monsieur… regardez mieux, soyez complices de la lumière extérieure et intérieure. Laissez- vous hanter.■■■■ Laissez vous engloutir.■■■■ N’ayez pas peur !■■■■ Non, allez y doucement, faites des déplacements lents, des focales zoomantes.■■■■ Prenez tout votre air avant et retenez-le longtemps dans l’immersion. Ce n’est pas du goudron, non, c’est un parfum musqué■■■■. Vous voulez un ou plusieurs échantillons ? Ne confondez pas avec Buren, ce serait dommage, car ce n’est pas la même histoire !
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    Merci Michel Saludo !

    • C’est vrai que j’ai pensé intituler le texte outrenoir; mais je ne voulais pas que la référence soit trop évidente.
      Merci Marie-Thérèse d’être passée par ici.

  3. j’arrive un peu tard, déjà tant de louanges
    inutile d’en rajouter…
    juste te dire que je suis rentrée dedans tout de suite entre ébène, bitume, charbon, or noir… ça bouscule et génial ta trouvaille du carré noir…