Dix nuits Atelier été 2021 Sylvie Serpette

Présence de ce tableau chez mon grand-père à la campagne peint par lui : un boxeur en short et gants de boxe prêt à se battre en couleurs fades et en hauteur par rapport à mon lit son regard au-delà de moi malaise

comme au cinéma, suivre sur le mur les phares de voitures qui passent dans la rue par les volets et dessinent des motifs qui glissent et s’effacent treillis de barres grises qui longent les murs pour y entrer peut-être

Un jour j’ai laissé r i e n sur le drap en me réveillant les lettres tombent une à une du tissu pourtant dans ma vie là juste une séparation amoureuse alors r i e n au réveil buter contre ce message que je lisse maintenant pour l’estomper quoi qu’est rien ?

Dès le premier matin j’ai eu sur ce lit étroit un lit de célibataire dès le matin et tous les autres j’ai eu devant les yeux évidemment il n’allait pas en changer chaque jour devant les yeux le tableau de Guernica et surtout ce cheval hennissant qui allait très bien avec l’impression de picador de cette première nuit de sexe raté ce cheval furieux cette guerre ces démembrements

Oh ! les vagues rafraîchissantes longs soupirs sur roulis de cailloux pauses où se retirent et se hissent et se haussent les suivantes plus gonflées encore et la jouissance de flotter dedans dessus allongée oui mais sur mon lit avec à l’oreille cette respiration profonde quand le corps entier est un souffle de mer s’épandant se rentrant ventre puissant

Et j’ai pris mes cliques et j’ai pris une claque en pleine nuit j’ai quitté le lit qui n’était plus si doux dehors il faisait bon j’irai dormir ailleurs jamais si éveillée vivante

Les plus grands voyages dit-on se font de nuit dans le lit ce qui est vécu le jour se démultiplie se voit se rend plus gros plus coloré plus fort le cœur meurt dix fois la minute le corps en entier s’agite on est loin parfois on ne revient pas et c’est la fin qu’on se souhaite

Mon lit cette nuit est un jardin

Dormir le jour quand les autres besognent le monde avance ils te protègent rideaux tirés vide fait abandonné aux absents tu vogues tu vagues étendu tu travailles autrement