outils du roman #10 | au cinéma, sans histoire

cycle été 2020 | outils du roman


 

au cinéma, sans histoire


Note 1 : nous voilà au premier tiers de cet atelier de 3 mois, 10ème proposition. D’où un temps d’inflexion, de rebond. Une proposition plus libre, une proposition de transition avant de reprendre des exercices plus techniques. Donc l’occasion, pour les participant.e.s qui sont « à jour », d’un texte plus long, construit en plusieurs étapes, un texte qui s’accumule. Et, pour les autres, qu’on se rassemble tou.te.s dans le même tempo, le temps d’effectuer les exercices précédents.

Note 2 : il n’y aurait rien de pire que se dire : voilà un thème, j’en fais un fragment de « roman ». J’y insiste toujours : la cohérence, le territoire même, seront rétrospectifs. Ici, on installera un lieu complexe, des personnages multiples, une durée ou un temps, un ou des narrateurs et narratrices (ils n’ont pas forcément besoin de nom, mais on peut très bien imaginer un texte à deux voix il/elle, il/il, elle/elle, elle/il...), mais on est dans une suspension, dans une attente, dans un dépli préalable, sans amont ni aval, du roman virtuel, le roman à venir. Vraiment se concentrer là-dessus : la frustration de ne pas en faire une histoire est justement ce qui va nous permettre d’installer romanesquement ce lieu, cette durée, ces personnages...

Note 3 : le cinéma ? Pas par hasard. D’abord, parce que lieu de représentation, donc de mise en abîme de la scène romanesque et, encore plus, de la scène romanesque en attente, de la scène romanesque absente. Et puis, comme la photographie a mis longtemps à pénétrer l’univers de la prose narrative, le cinéma, en tant que lieu et dispositif en est encore très absent. La scène du cinéma sans électricité pendant l’orage, dans Au-dessous du volcan de Malcolm Lowry, est un hapax, elle va nous guider.

Note 4 : prendre le temps d’explorer ce dont vous avez mémoire du cinéma qui se représente narrativement. Au cinéma, c’est depuis toujours que le film se cite dans sa matérialité : Terroriste de Hitchcock, et évidemment La rose pourpre du Caire de Woody Allen, évidemment Amarcord et Roma de Fellini, ou son 8 1/2. Mais en littérature ? Passez voir Nyarlathotep de Lovecraft, mais surtout l’extrait mis à votre disposition du Cinéma des aveugles qu’évoque Gustav Janouch dans ses Conversations avec Kafka, ou le Chasseur de crépuscules de Cortazar. Ce sont d’autres extraits dans l’espace abonnés, mais si vous avez chez vous Oeuvres d’Édouard Levé il y a de solides exemples aussi.

Note 5 : vidéo complémentaire associée à celle plus haut, Lowry, Breton, Kafka au cinéma.

Note 6 : alors, juste un exercice à se faire plaisir ? Oh, trop simple ! On a travaillé sur perception omnisciente, sur situation de tension laissant le narrateur à l’extérieur, sur l’opposition narration ample et narration brève, sur l’opposition phrase soft et phrase hard, puis sur l’importance du présent dans l’idée de caméra temporelle mobile, puis sur l’inscription visuelle, dans une narration, des scénographies d’intérieurs ou d’extérieurs, enfin sur différentes énonciations, par des narrateurs différents, d’un même lieu... Et si, dans le texte que vous allez écrire, chacun de ces outils techniques était discrètement perceptible ? Et si, pour avancer dans votre cinéma sans histoire, vous appliquiez phrase à phrase, ces exercices ?

Note 7 : souvenirs d’enfance de cinémas, souvenirs décalés de cinémas, inventaire des lieux où vous avez vu des films, parkings de cinémas, halls, couloirs, attente devant porte (fins de séance) de cinéma, sortir dans la rue en plein jour d’une fin de dimanche après-midi après 2 heures dans la nuit du cinéma... Moments où ces projections ont coïncidé avec une intensité particulière de votre vie... Et il n’y aurait rien à dire ?

Note 8 : on avait beaucoup tourné autour de tout ça dans le cycle vers un écrire-film, mais du point de vue du film et son écriture, non du point de vue du lieu et des dispositifs...

Note 9 et (provisoirement) dernière : j’insiste, j’insiste, j’insiste, c’est la frustration de ne pas pouvoir s’embarquer dans une histoire qui va imbiber, imbiber jusqu’à éponge, jusqu’à saturation, ce que vous allez écrire... Partez donc juste sur cet instant de la sortie du cinéma, quand rejeté à la ville, déployez en boucles, en spirales, en cercles s’élargissant, en flashbacks, en souvenirs, en descriptions partielles (tiens, dans Tentative d’épuisement d’un lieu parisien de Perec il n’y a pas la description d’un ticket de cinéma ?

Note 10 et (définitivement) dernière : on a déjà travaillé plusieurs fois, dans les cycles précédents, sur l’idée de reprendre plusieurs jours de suite l’expansion d’un même texte — soyez chic, pensez à celles.ceux qui en profitent pour avaler les propositions non encore rédigées (mais faire celle-ci en parallèle, pourquoi pas...) ! Et si vous êtes brillant, majestueux, explorateurs.trices, sensibles, musicien.ne.s, partant pour en faire un livre, à chaud, dans la foulée, envois à partir du 10, on bloque tout au 15 août et le livre est dispo le 25 [1], ça vous laisse dix jours c’est super, non ? Proposition perverse mais ferme !

PS : par exception, l’ensemble des contributions #10 sera installé sur une page collective spécifique, mais incluant renvoi vers votre page personnelle, occasion de plus pour multiplier croisements et découvertes...

 

[1Pour Parpaings l’été dernier, j’avais laissé beaucoup trop traîné et ensuite je ne m’en suis plus sorti, corrections, reprises...


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1ère mise en ligne et dernière modification le 3 août 2020
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