Ariel enfenêtré

Sur les trottoirs coriaces aux caniveaux opaques elle marche derrière lui sans un mot quand il aperçoit leur reflet décalé dans une vitrine se dit qu’il devrait ralentir se régler sur son pas mais non il préfère regarder la silhouette tressauter comme dans le couloir du Paris-Brest à 15 ans assis à la place 52A le nez dans le rideau Continuer la lectureAriel enfenêtré

Ma vie parallèle en compagnie d’un ours, d’une girafe et d’un hippopotame

Je suis sortie du ventre de ma mère un jour de neige. Dommage fille et dommage rouquine. J’ai laissé dire, fait semblant d’avoir le choix et on a fini par m’accueillir. J’ai remué, vu virevolter des drôles de formes blanches qui étaient mes mains, gazouillé, jubilé de ma gorge qui vibrait et de ma bave qui roulait, rugi, fait pousser Continuer la lectureMa vie parallèle en compagnie d’un ours, d’une girafe et d’un hippopotame

L ‘ a n c ê t r e

Assoupie vient la boutique de Kalliroï         improbable foutoir de présentoirs de fortune         pièces uniques         parfois orphelines        dépouillées de leur alter comme cette boucle de cuivre tressé        ressort tendu à l’opale enchâssée        la boutique est étroite        encombrée          pas de mot pour dire cette luxuriance de rouille et d’éclats                curieusement on respire                chaque objet est une porte antique                 tenons-nous le pour dit        Kalliroï est sans pareille        trois ans que Continuer la lectureL ‘ a n c ê t r e

Petite oasis à manivelle

A peine une minute d’arrêt à la station Molière. Ce soir toute la ville est un corps qui brûle, nébuleuse, dépeuplée, intouchable. Seuls sur la place en travaux quatre jeunes SDF chahutent avec une pétulance inhabituelle autour d’une sorte de borne qui fonce la croûte de sable damé : un point d’eau, semble-t-il. Des rires crèvent la chape et avivent des Continuer la lecturePetite oasis à manivelle

Affabulation

Un Une enveloppe de plastique translucide, mettons violette ou rose. Cellophane, cellulose diaphane. Vaine et magnifique. De chaque côté du renflement central, deux corolles entortillées frétillent et s’offrent aux doigts qui les saisissent. Deux doigts, trois au plus. Corolles, cœur, couronnes, coursives. Papier promesse, crissement indiscret, fait se tourner les têtes. Cristallin. Luminescent. Frisson avant la bouchée. Séditieux, tissulaire, insuline, Continuer la lectureAffabulation

Optique foutraque

Consignes Une heure après le décollage on vous a imposé des lunettes 3D for your greatest pleasure. Vous avez cru comprendre que le film était projeté sur le verre des lunettes, donc pas de lunettes, pas de film : no glasses, no movie. Vous avez risqué un no movie, mais on vous a gesticulé que le visionnage des consignes de sécurité, safety Continuer la lectureOptique foutraque

Accélération et alvéoles

GARE, six heures du matin, le monde se tient clos dans la moiteur agglutinée la veille GARE les grilles se lèvent avec un grincement éreinté, laissent entrer l’air qui charrie une odeur de cigarette tandis que la voix artificielle vocalise tatatala bordure du quai tatatala, étiquetage de vos bagages, débite à grande vitesse horaires et numéros de trains, enchaîne sur Continuer la lectureAccélération et alvéoles

Trois tentatives pour apprivoiser le sol

Sur le parquet moelleux couleur caramel je limaçonne de lame en lame, flaire l’encaustique piégée dans les rainures et entortille ma grenouillère à papillons multicolores – drôle de mot, « grenouillère », mais c’est une autre histoire – je me tourne sur le dos, agite les pieds, pédale, m’affole : allongée par terre la lumière toute droite me cloue et Continuer la lectureTrois tentatives pour apprivoiser le sol