#photofictions #06 | Piège photo

De nuit. Juste deux yeux trop blancs et trop grands, le reste en dégradés de gris. Une silhouette, le museau levé, tête tournée, elle fixe le piège photo. L’extrémité de la patte avant gauche est flou, l’animal marche mais ne court pas, ses trois autres pattes sont nettes, comme il est de face, on ne voit pas la queue, dissimulée par le corps. Il a traversé le cadre suivant sa diagonale

Face blanche, deux lignes noires qui partent des oreilles pour aller jusqu’au museau en passant par les yeux. Ce qu’on suppose être les yeux, deux points plus brillants que le reste, beaucoup de grain, aucun détail pour le corps, les pattes se perdent dans les herbes

Tête baissée, mandibule inférieure décalée, il mange. Aucun détail dans la tête, les yeux, la bouche, couleur entre brun clair et grisâtre, herbes trop hautes pour en voir distinctement plus. Deux oreilles, grandes, presque aussi grandes que la tête, longues et larges. Immenses. Orientées l’une et l’autre de façon différente. Corps solide et musclé, longues pattes fines

Le haut des herbes penche. Elles forment comme un creux, un nid provisoire. Mais on ne sait pas qui est là, on ne voit rien, les herbes, perfides, le dissimulent tout en attestant de sa présence 

Passage en V, juste deux ailes et le flou du battement

A propos de Juliette Derimay

Juliette Derimay, lit avidement et écrit timidement, tout au bout d’un petit chemin dans la montagne en Savoie. Travaille dans un labo photo de tirages d’art. Construit doucement des liens entre les images des autres et ses propres textes. Entre autres. À retrouver sur son site les enlivreurs.

2 commentaires à propos de “#photofictions #06 | Piège photo”

  1. J’aime cette patience indicible de l’observation, de l’attente où ce qu’on espère laisse imaginer les possibles photos de l’animal pris au piège du photographe. Beau moment de lecture à l’affût ! Merci Juliette.