#40jours #27 | nocturnes?

Tu as déménagé ou quoi ? Et aux questions des visiteurs du blog as-tu répondu ? Les réponses ? Plantées? Ratissées ? Les arbres des petites collines, il y a des conseils pour eux ?  Si les troncs pouvaient parler, ils diraient quoi ? Tu ne pourrais pas parler pour eux ? Parler d’eux aussi ? Parler pour deux ? Ou plus ? Revenir au pays de la marge, tu comprends ? Et expliquer un peu pourquoi tu es là et puis plus là mais là quand même, la preuve c’est que je n’avais pas prévu d’en parler et j’en parle, tu comprends ? Les espaces verts tu trouves ça simple ? Compliqué ? Tu es déjà revenu marcher la nuit respirer les fleurs qui ont poussé depuis que tu les as plantées ? Tu vois ce que je veux dire ? Revenir ? Tu penses quoi de ceux qui ont fait un massif sous les fenêtres du rez-de-chaussée ? Et le gazon japonais ? Ça vaut le déplacement ? La cité, tu y penses encore ? Pourquoi on ne te voit plus ? C’est l’âge ou quoi ? C’est la guerre d’ailleurs qui t’éloigne des espaces verts ? Tu crois vraiment qu’elle tétanise tout, même les arbres ? Ils se taisent à cause de ça tu crois ? Et toi tu fais comme eux peut-être ? Est-ce que tu ne serais pas devenu un arbre des petites collines ? Un qui préfère se taire parce qu’il en a trop dit ? Trop fait, trop vu peut-être ? Et l’idée de semer des graines à la volée dans le quotidien, c’est bizarre ? Ou pas ? Inutile tu crois ?  Tu as l’expérience : la meilleure saison, c’est laquelle ? Celle qui pousse à l’intérieur ? Drôle de question non ?  Est-ce que ça correspond ? Un hiver au-dedans n’est-il pas printemps à un autre endroit ? On pourrait semer du blé dans les creux des petites collines, non ? Jamais ça ne t’a traversé l’esprit ? Tu ne trouves pas que c’est compliqué de parler du blé ? Quand les jeunes achètent du pain tu crois qu’ils savent comment on fait pour en arriver à ce qu’ils achètent chez Paul ? Sur ton blog si tu le reprenais, tu pourrais aborder la question, non ?  Dire comment ça se passe en pleine terre tu pourrais ? Et leur proposer d’essayer de faire tu pourrais ? Essayer de faire ils pourraient ? Montrer avec tes dessins comment le grain semble se désintégrer quand il est en terre ? Tu pourrais ? Et le lien entre les espaces verts et les moissons, ça existe ? On pourrait y penser ? C’est comme les tonnes de grains bloqués dans les bateaux : on pourrait imaginer quoi pour que les bateaux partent vers les pays de la faim ? Imaginer ça servirait à quoi ? Multiplier les pages du petit journal aux caricatures en parlant des moissons piétinées, ça vaudrait le coup d’essayer ?  Ça t’arrive la nuit de dériver dans tes espaces verts en toute liberté ?  Ou de refaire les petites collines sans les cratères des obus ? Ou de comparer les quartiers fracassés de là-bas avec la cité d’ici ?   C’est quoi ces questions de la nuit ? Elles vont où ? Et toi ? Un déménagement ? Un transfert ? Des espaces verts que tu soignes ailleurs entre deux alertes ? Tu ne te serais pas réfugié ailleurs par hasard ? Tu es devenu qui ? Réfugié tout court ? C’est qui toi ?

A propos de Christine Eschenbrenner

Génération 51.Une histoire de domaine perdu, de forteresse encerclée, de terrain sillonné ici comme ailleurs. Beaucoup d'enfants et d'adolescents, des cahiers, des livres, quelques responsabilités. Une guitare, une harpe celtique, le chant. Un grand amour, la vie, la mort et la mer aussi.

Un commentaire à propos de “#40jours #27 | nocturnes?”

  1. Une sorte de réquisitoire soft, qui m’a fait sourire au détour des phrases interrogatives.
    Merci Christine pour ce beau moment de lecture !