#été2023 #07 | Vase

Le corps de l’inventeur (en archéologie on appelle inventeur celui qui trouve un site) patauge à l’intérieur de sa carapace, bonnet, lunettes d’écaille, col remonté par-dessus le bleu de travail, bottes en caoutchouc qui font craqueler sous les semelles les plaques de gel, jusqu’à la boue, janvier 53. De la tombe (corps fatigués suintant de sueurs, dans le bruit des pompes à eau) ils finissent par extraire un récipient de bronze écrasé par les siècles sous le toit effondré du caveau, sous le poids de la terre, des pierre, du tumulus de la dame – la princesse – dont le corps a disparu.

Plus tard, quand on aura recollé les morceaux, qu’on aura redonné sa forme à peu près au plus grand cratère de fabrication grecque connu à ce jour – cratère qu’on a envie d’appeler un chaudron – une photo est prise. Sur la photo, un enfant s’est installé debout dedans, pendant qu’on le transporte vers le musée de Vix. Son corps est entièrement caché par les parois bombées. Ne dépassent du col qu’une tête espiègle et le bout de ses doigts.

A propos de Laure Humbel

Dans l’écriture, je tente de creuser les questions du rapport sensible au temps et du lien entre l’histoire collective et l’histoire personnelle. Un élan nouveau m'a été donné par ma participation aux ateliers du Tiers-Livre depuis l’été 2021. J'ai publié «Fadia Nicé ou l'histoire inventée d'une vraie histoire romaine», éd. Sansouire, 2016, illustrations de Jean Cubaud, puis «Une piétonne à Marseille», éd. David Gaussen, avril 2023. Un album pour tout-petits, «Ton Nombril», est paru en octobre 2023 (Toutàlheure, illustrations de Luce Fusciardi). Le second volet de ce diptyque sur le thème de l'origine, prévu au printemps 2024, s'intitulera «BigBang». Actuellement, je travaille à un texte qui s'alimente de la matière des derniers cycles d'ateliers.