#Ateliers d’été 06# /Sans titres

Quelques travaux sur une toiture ? Demander un devis ? hum, tuiles, chevrons, isolant, main d’œuvre… total ? Tous ces composants ont un coût, ont un prix, demander un deuxième devis, faire « jouer la concurrence » ; toi aussi, tu joues le jeu, tu espères ne pas être victime d’un monopole, d’une « position dominante », tu te rappelles les parties de Monopoly avec tes copains, les faux billets tellement vrais, « position dominante », acheter, vendre tel ou tel quartier, les Eaux ou le Gaz, dominer, puis encaisser, à chaque tour, un loyer, un péage, le montant de la facture, la chance, parfois, comme au jeu, comme un jeu dont certains, défaits quittent le plateau, abandonnent hôtels et maisons, maisons demandant travaux d’entretien, assurances, abonnements divers.

Dire oui au devis, sans jouer le jeu, dire oui au premier arrivé, dont on connaît le nom, la famille, l’épouse et les enfants, – tu aurais trouvé mieux ailleurs – moi, je ne fais confiance qu’à – 18 heures de main d’œuvre, tu t’es fait avoir – ; essuyer les quolibets des copains qui tous, depuis toujours, jouent le jeu, en connaissent les finesses… jeu qu’il te faudra jouer pour régler la facture, un jeu complexe faisant appel aux plus universelles règles capitalistes, la partie émergée de l’iceberg, arbitrée à la Bourse des Valeurs, vendre une partie des actions héritées de ton père, lesquelles ? cette marque de cosmétiques, qui sent bon (un peu facile, Max…) la collaboration, ou ce pétrolier gros pollueur, gros porteur, appâtant les petits porteurs comme toi, tu as l’embarras du choix, dans les limites du CAC 40 et de ton héritage.

Tu as hérité de quoi ? D’un petit oreiller sur lequel s’endort ta conscience, pour lequel trois générations ont trimé, d’abord travaillant un lopin de vignes mangées par phillox Phileas Fogg arrivé d’Amérique, jouant le jeu du tour du Monde en une saison, apôtre ravageur de la mondialisation, convertis en éleveurs polyculteurs, bûcherons, bourgeois industriel, puis dilettante héritier, assuré de son avenir bien que passé du champ au cadastre, du bois au papier, du cahier à l’ordinateur où, à la demande, tu peux aligner les titres, les Titres, creux comme des livres faits de pages blanches couronnées par un T…..

Sans le savoir, sans le vouloir, tu es le joueur, le mort d’une mondiale partie de bridge dont le poker n’est que le pâle reflet.

2 commentaires à propos de “#Ateliers d’été 06# /Sans titres”

  1. « Tu as hérité de quoi ? D’un petit oreiller sur lequel s’endort ta conscience »
    Quelle belle formulation, et adaptable à… Merci JMG

  2. Texte prenant. L’oreiller où s’endort la conscience, quelle belle image ! Et la chute terrible. Ce qui est réussi c’est qu’à partir de la réparation d’un toit on arrive à la mort d’une « mondiale partie de bridge », jeu extrêmement codifié, où tout est déjà écrit.