Disparition programmée

MUR DE FEUILLAGE

Entre dedans et dehors, un mur, trois fenêtres longues et fines, de l’autre côté des vitres, un mur de feuillages, des arbres, arbres verts et touffus, plutôt insignifiant de prime abord, des feuilles comme partout, comme dans chaque coin de jardin un peu sauvage, un peu touffu. Selon le point de vue de celui qui écrit, la forme change : Poétique, les feuilles des branches se balancent au gré de la brise qui souffle… Écologique peut être, bref ici l’objet de l’écriture pour voir, voir plus si affinités. Dans le monde d’aujourd’hui, un sujet sensible, feuilles qui sèchent, feuilles qui tombent, feuilles détruites sans retour possible. Parler du feuillage proche, familier et s’engager différemment dans le texte

Ces feuillages vus chaque jour sans être vraiment regardés, méritent un temps de s’y arrêter. Arrêt sur image- changement de point de vue. Premier plan, à travers la fenêtre centrale, un buis, taillé à la japonaise, à l’image d’un bonsaï géant – envahi chaque printemps par des chenilles, traité, coupé, taillé, il échappe à la destruction programmée Fenêtre de droite, des feuilles de bambou, fines – bambous qui envahissent au fur et à mesure du temps l’espace dans sa totalité ses racines ne faisant pas de distinction entre le terrain privé et celui du voisin, elles s’immiscent dans le sol, sol argileux – pas de limite sauf à couper, déraciner, enrayer, détruire ? la main de l’homme détruit, à raison pour endiguer l’envahissement de cette nature qui se déploie généreusement, mauvaises herbes et autres proliférations débordantes mais plus souvent à tort, destruction des forêt tropicales, amazoniennes, qui tel un jeu de dominos va détruire des espèces animales, végétales proches et lointaine, inconsistance de l’homme, qui se détruit lui même…Plus loin les feuilles des noisetiers et autres arbustes, buissons, feuilles traversées par la brise, mouvement du vent qui laisse son empreinte derrière d’autres arbres au feuillage vert, dégradé de vert, jauni et parfois complètement desséché par les canicules passées, annoncées, programmées…

Au fond, en arrière plan, trois épicéas géants des pommes de pins au bout des branches, à l’image de ceux du parc de la tête d’or à Lyon « fragilisés par les vagues de chaleur, ils ont été victimes d’une attaque fulgurante de scolytes, coléoptères qui creusent des galeries sous l’écorce et empêchent la sève de circuler secs », asséchés, desséchés, taris, foutus, arbres morts en attente d’être coupés, découpés, tronçonnés, réduits en morceaux de bois, qui finiront dans le poêle, histoire de se chauffer, se réchauffer, se réconforter, se rassurer, se dire que tout n’est pas perdu que sans doute d’autres repousseront. Un feuillage comme un mur de protection à la vue des autres, illusoire, franchissable, un mur végétal, ni un mur de parpaing, ni un mur de béton

A propos de Caroline Burgy

Lire, écrire, faire écrire, trois mots, marqueurs de ma vie, animatrice d'ateliers d'écriture, ils ont jalonné ma vie depuis quelques années, des rencontres avec quelques passeurs m’ont donné l’occasion de soutenir cette place avec les autres. Marguerite Duras écrivait "l'écriture c'est l'inconnu. Avant d'écrire on ne sait pas ce qu'on va écrire..." sans doute suis je portée par cette part d'inconnu à découvrir au fil du temps...