Du temps à ne pas savoir qu’en faire…

La journée est longue comme celle d’hier comme celle de demain les journées s’étirent se ressemblent le temps est élastique les heures s’éternisent pendant des heures et s’accélèrent parfois sans raison, bientôt, déjà, et les heures se ressemblent, il faut les remplir cuisine lecture écriture mails téléphone mots croisés puzzle, et cela aussi finit par se ressembler, trouver autre chose, repos mais ça fatigue, sortir mais pas trop loin dans le jardin sous le soleil de printemps il rayonne ce soleil précoce il réveille la nature, peindre, tu peux peindre devant toi le paysage est magnifique les couleurs se réveillent 50 nuances de vert dans la vallée des ombres noires et violettes sur les pentes du mauve rosé dans le ciel bleu des harmonies des symphonies, de l’aquarelle peut-être, tu aimes les fondus des couleurs mais pour l’aquarelle pour ce fondu tendre des couleurs il faut de la sérénité et tu n’en as pas, la tension monte insatisfaction énervement dans ces heures qui s’étirent, il faut de la force des taches de la couleur pour réveiller l’énergie, alors de l’huile mais tu n’as pas trop l’expérience c’est pas le moment, alors du pastel, du pastel aux teintes vives sur un papier bleu comme le ciel bleu comme la mer, et tu regardes ton paysage et tu cherches des détails, et puis l’impression d’ensemble pour les taches des taches de couleur, et tu choisis le bâton de craie tendre, tu étales tu frottes tu estompes avec le doigt avec le chiffon tu gommes, sur le vert pour les arbres tu ajoutes des reflets du jaune du rouge du bleu pour les toits des maisons pour le pont qui enjambe la rivière, l’eau devient bleu outremer puis plus clair avec une touche de blanc et ton dessin prend du relief et les tulipes tout près éclatent en beauté, et le rouge réveille ton courage et le jaune te donne de la joie et le bleu profond t’apaise et la journée ralentit s’éternise dans une plénitude bienvenue tes couleurs se posent s’organisent explosent sous tes doigts et la journée n’est plus perdue tu es contente tu as créé un autre paysage qui te ressemble plus  qui exprime mieux ce que tu peux ressentir révolte fatigue épuisement résignation acceptation rien d’autre à faire en attendant que ça aille mieux que ça change ça ne dépend pas de toi ou juste un petit peu et en fin de compte tu n’es pas si mal tu t’accommodes, juste un peu bizarre il n’y a personne sur ton tableau personne sur ton paysage personne dans les environs tu ne pensais pas que ça te manquerait autant ?

A propos de Monika Espinasse

Originaire de Vienne en Autriche. Vit en Lozère. A réalisé des traductions. Aime la poésie, les nouvelles, les romans, même les romans policiers. Ecrit depuis longtemps dans le cadre des Ateliers du déluge. Est devenue accro aux ateliers de François Bon. A publié quelques nouvelles et poèmes, un manuscrit attend dans un tiroir. Aime jouer avec les mots, leur musique et l'esprit singulier de la langue française. Depuis peu, une envie de peindre, en particulier la technique des pastels. Récits de voyages pour retenir le temps. A découvert les potentiels du net depuis peu et essaie d’approfondir au fur et à mesure.