#été2023 #10bis I l’indiscrétion

Quelle est cette indiscrétion dans laquelle on me plonge ? Si j’étais apte à la honte j’en emprunterais le costume. Mais il n’est pas à ma taille. On m’a affublé d’un uniforme sans décorations loin de l’Habit Vert – en réalité bleu foncé ou noir – qui m’échoit dans les rêves. On m’a fait beau, certes, mais petit, et qu’est-ce que la beauté sans la grandeur ? Je frémis chaque fois qu’on écrit le petit facteur, j’en sais la tendresse qui déborde mais il n’y a pas là ce que j’attends, l’admiration. On ne m’en donne pas les moyens. Je suis juste un pilleur de vies à travers le courrier que j’ouvre. Où est mon imagination ? Où est ma créativité ? J’utilise les données comme le ferait un GAFA sans en avoir les bénéfices. On pourrait pousser le cynisme jusqu’à me faire vendre ces données directement, sans les transformer en fictions. Là je comprendrais l’indignation, celle soulevée par mon indiscrétion. Mais là, n’est pas le propos. On n’est pas capable de m’embarquer sur l’océan de la création. Je n’en vois que les vagues de ce qu’on appelle la barre à la sortie des estuaires et qui est due à l’accumulation des alluvions. Moi j’accumule les données et je suis mal barré. On ne m’aide pas à rejoindre le grand large. Je rame, je rame et je rame. On me fait tenir un journal de mes tournées monotones. Journal qui est davantage un répertoire du courrier que je distribue, avec nom du destinataire et de l’expéditeur, date, provenance géographique. Et je dois me servir dans ce répertoire pour créer des fictions sous forme de recueil de nouvelles. Mais quand va-t-on me lâcher la bride ? Pour le moment je n’ai encore rien écrit… ou si peu ? On m’a demandé, avant de commencer, de définir le thème générique qui liera les nouvelles ? C’est nouveau ! Jusqu’ici je ramais à vue. Oh ça a été vite trouvé… j’ai dit : l’indiscrétion

A propos de Claudine Dozoul

Se balade entre écriture et pratiques artistiques diverses. Animatrice depuis longtemps d'ateliers d'écriture.

Un commentaire à propos de “#été2023 #10bis I l’indiscrétion”

  1. finalement je transforme ta question : l’indiscrétion serait le facteur commun à toutes ces nouvelles dont tu parles, oui, mais est-elle une qualité pour celui qui écrit ?
    faut-il parfois franchir les barrières qu’on s’est dressées tout seul, faut-il prononcer certains mots qui ont la capacité de frapper l’esprit ou de l’adoucir ou de le choquer ? mais je suis peut être à côté de la plaque…
    en tout cas contente de te découvrir…