#photofictions #08 | autonomie 990 km

10H30 sur l’écran de l’Iphone, la pluie cesse, et monter dans la diesel qu’elle m’a prêtée: avec un plein tu peux rouler longtemps vérifie avant, il suffit d’appuyer sur le bouton en tête du bras (celui du clignotant) pour faire apparaitre l’information en lettres numériques sur le tableau de bord: orange sur noir AUTONOMIE 990 km (l’autonomie du véhicule qui te conduit — mais c’est toi qui conduit) Allez c’est parti! DECOTRAIN TRANS-EUROP deux jours plus tôt, nous marchons, longeons BLANCHE: rails, motrices, arbres, silhouettes miniatures… des trains électriques modèle réduit dans une vitrine et : balza, mousse, colle – j’en avais acheté du balza dans cette boutique, il y a longtemps pour une maquette, un opéra je crois. LAVOMATIC INDIAN FOOD on se sépare sur le boulevard à l’angle de STEINKERQUE au 2 je tape le code puis c’est le défilement des noms : oui ma chérie je t’ouvre oui ma chérie oui ma… dans l’OTIS cabine minimaliste et lumière halogène je vois ma tête, c’est parfois surprenant de se croiser dans un ascenseur ( ça faisait longtemps): POIDS MAXI 330 — j’ai pesé le chat l’autre jour à la clinique vétérinaire j’avais oublié le masque MERCI DE PORTER UN MASQUE à l’entrée une simple feuille scotchée ( j’ai oublié le masque ça se fait moins le masque non?) NON, sur la vitre de l’ascenseur le mot tatoue ma lèvre NON le mot au crayon NON en gras et redescendant (à peine une heure) c’est effacé Et descendre vers la rame : ANVERS pas le temps d’attraper les mots du couloir de LA CHAPELLE un train sur trois annonçait le téléphone: la H grève avant, après, et pendant: TRAVAUX SUR LA LIGNE ce sera VOIE 34 avec trois fois le plein de voyageurs: SAINT DENIS /EPINAY/VILLETANEUSE/ENGHEIN Au feu ce matin 10H37/ risque de pluie dans l’heure/ Les femmes savantes les lettres défilantes du panneau annonceur de la mairie : j’éternue. Je laisse la station TOTAL, sur ma droite pas de carburant (pancarte manuscrite) mais AUTONOMIE 990 km sur le tableau de bord… ELLE LE REGARDE DANS LES YEUX IL LA TUE c’était quand? la fille adossée au mur téléphonait, c’était quand? les mots prolongeaient ses épaules, une fille grande, talons, manucure, c’était quand? (oui j’ai vu les doigts les ongles même la bague) il faisait beau c’était quand? elle portait un masque c’était quand? je m’en souviens dans les toilettes de la station service avant Poitiers , l’affichette placardée derrière la porte, je me souviens des mots qui prolongeait les épaules de la fille, carrés blancs marouflés sur le mur… après j’ai le soleil dans les yeux une soixantaine de kilomètres, en passant CRAMCHABAN (le nom nous faisait rire) le soleil devient noir, ça déferle, SOURIEZ VOUS ETES FILMES, dans la mémoire nos voyages, ROMA TERMINI et graffiti ça prend un S au pluriel ?

A propos de Nathalie Holt

Rêve de peinture. Quarante ans de scénographie plus loin, écrit pour lire et ne photographie pas que son lit.

11 commentaires à propos de “#photofictions #08 | autonomie 990 km”

  1. Merci Nathalie Holt pour ce road movies dans les mots traversés. Dans les mots qui s’affichent, avec la force aiguisé d’un Jacques Villeglé, vous arrachez des fragments, donnez d’autres sens a un réel en morceaux.. Pour nous faire lire autrement, merci et bravo. Et pour les voies ouvertes aussi, merci Nathalie.

  2. Ballade en mots rencontrés, pensées arborescentes et lumières du quotidien. J’ai aimé le cocktail sans sucre ajouté. Merci.

  3. Bonjour Nathalie
    Voilà un super défilement de mots avec les incrustations de signes qui entrechoquent les significations… Merci pour cette belle lecture !