Un manque immuable

16 octobre 2012

Élio, 

Je t’écris depuis Francfort pour te dire que tu me manques. Notre maison me manque. Je revois les volets peints en bleu, la porte en bois sur laquelle on avait gravé des motifs à l’Opinel, le perron en pierres parsemé de fleurs. Je n’ai pas eu la force de rester. Je ne sais plus comment vivre sans toi. Je suis perdue sans toi. 

Nils va bien. Il voit une psychologue et s’est fait de nouveaux copains. Tu lui manques beaucoup. 

Où que tu sois, je t’embrasse. 

Tilia 

18 juin 2012

Voilà déjà 2 jours que le propriétaire de la maison aux volets bleus a disparu après avoir laissée une lettre à sa femme. Les recherches continuent. 

16 juin 2012 : 10h 

10h du matin. Je me lève, m’étire, sors de mon lit, descends les escaliers, encore endormi. Arrivé en bas j’aperçois ma mère allongée sur la table de la cuisine. Elle pleure sans faire de bruit. Elle se relève dès qu’elle m’aperçoit et essuie ses larmes. Elle tente de ravaler son chagrin mais je vois bien que quelque chose ne va pas. Elle me regarde, les yeux rouges. Je déteste voir ma mère pleurer alors je me mets à pleurer, moi aussi. Elle se jette dans mes bras. Je la serre fort, sans chercher à savoir tout de suite ce qui se passe. J’attends qu’elle se calme.Elle me montre la lettre. 

16 juin 2012 : 7h 

Tilia, 

Je pars. 

Je suis malade. 

Ne m’en veux pas.

Prends soin de Nils. Dis lui que je l’aime de tout mon cœur. 

Je te confie la maison. Repeint les volets quand tu auras le temps. Plante des bleuets devant le perron. Et vernis la porte pour qu’on puisse conserver les motifs.

Je t’aime,

Élio 

Un commentaire à propos de “Un manque immuable”

  1. 17 juin 2012

    Le chef nous convie tous à une réunion : « On recherche un homme d’une cinquantaine d’années : Élio Beauregard. Il a disparu depuis 24h. Fouillez tous les coins, regardez au bord des courts d’eau. Vous savez ce que vous avez à faire! »

    On sort les chiens. Ils flairent des vêtements du disparu. Les recherches commencent. Je m’aventure dans la forêt, proche de la maison aux volets bleus. Apparement, Élio aimait venir ici. On tourne pendant des heures. Des kilomètres de parcourus sans trouver l’once d’une trace.

    19 juin 2012

    On continue les recherches. C’est éprouvant et fatiguant. Je me retrouve dans la maison aux volets bleus. N’ayant rien trouvé, on est venu chercher des indices sur place. Les collègues commencent à l’étage, je m’attaque au sous-sol.

    L’endroit est lugubre, il n’y a aucune fenêtre, la lumière est très basse. Je me dirige tout au fond de l’espace, renfermé et humide. J’aperçois une faible lumière. Je m’approche et découvre un congélateur dans un recoin. Je l’ouvre. Des légumes congelés : haricots, carottes, potiron, courgettes. Je soulève les sacs. Une boîte en plastique style Tupperware. Je la prends entre mes mains, l’observe, l’ouvre. Un cœur. Un cœur rouge. Un cœur d’homme. Un cœur congelé. Une voix : « Vous n’êtes pas censé être là ». Je me retourne. La femme, un tuyau en fonte à la main. « Il était trop obnubilé par sa maison, je n’arrivais plus à le raisonner ». Rien.