40 jours – #28 | ruminé, rabâché, ressassé

© Bernard Perlongo

Je ne dois pas oublier la phrase | je ne dois pas oublier la phrase | surprise à répéter je ne dois pas oublier la phrase | depuis ce matin | et le soir pas de phrase | quand je ne savais même plus pourquoi je répétais en boucle je ne dois pas oublier la phrase | ça me revient ce soir un peu en panique | des phrases j’en ai toujours plein la tête | ce matin au réveil par exemple « la guerre est à prendre » | mais c’est une phrase de rêve | une phrase de nuit ou de sommeil paradoxal | ça ne compte donc pas | pourtant la guerre est à prendre ça m’a posé question | d’emblée | au réveil | si vous voyez ce que je veux dire | j’ai répété plusieurs fois la guerre est à prendre en me demandant bien ce que ça voulait dire ça | la guerre est à prendre | et d’ailleurs ce soir | pareil | la guerre est à prendre finalement je ne comprends franchement pas ce que ça peut bien vouloir dire | même dans un rêve | est-ce que ce serait par exemple y aller | partir en guerre | ou bien prendre le parti de la guerre | ce qui ne serait pas exactement la même chose | voyez | partir en guerre ça peut être une obligation | morale ou circonstancielle | ce qui ne signifie pas que l’on prend pour autant le parti de la guerre | mais on y va |  alors que prendre le parti de la guerre | quelle que soit la guerre c’est être du côté de la guerre | et même en paix d’ailleurs | c’est faire le choix de la guerre | c’est être de l’avis que rien ne se règle autrement que par la guerre | ou que seule la guerre peut régler un conflit |  ça devient compliqué là | la guerre est à prendre | j’ai envie d’ajouter | ou à laisser |

A propos de Marlen Sauvage

Journaliste longtemps. Puis dans l'édition. Puis animatrice d'ateliers après une formation Elisabeth Bing et DUAAE à Montpellier. J'anime encore quelques stages d'écriture, ai contribué aléatoirement au site des Cosaques des frontières, publié quelques livres – fictions et biofictions – participé à plusieurs ouvrages collectifs. Mon blog les ateliers du déluge.