#40jours #31 | Femme de dos

Une femme de dos. Elle porte un pantalon blanc et ample. Elle ne marche pas comme Charlot, mais son pas est hésitant. Elle s’approche d’une voiture. La rue est déserte. Ce n’est pas la nuit c’est le jour. Elle farfouille d’une main dans son sac à main, elle est gênée par le gros paquet qu’elle porte de l’autre côté. Elle s’éloigne de la voiture. Elle s’éloigne vers le point de fuite. La rue est déserte, longues lignes horizontales déjà floues sur les côtés. | La foule. Une foule à pied. Des voitures et des tramways et même un cheval (des chevaux) qui monte et qui descend, les lumières du manège sont peut-être allumées ça ne se voit pas c’est le jour. Ça tourne. La femme de dos entre dans un magasin de chaussures. Elle porte le même pantalon blanc et ample, avance d’un pas moins hésitant, se retourne comme sur une idée. Elle n’a plus son gros paquet. Elle s’éloigne dans le magasin. La porte vitrée se referme. Devant le magasin passent et repassent des pieds. Ils sont différemment chaussés. | Dans la même rue qu’au début, les ombres se sont allongées. La femme porte un pantalon plus étroit et plus sombre. Elle traîne une grosse valise dont les reflets varient à chaque soubresaut des roulettes sur le macadam. Elle tourne à l’angle. Elle s’éloigne en montant la pente raide d’une rue dont les parallèles se rejoignent à l’infini, ligne au milieu de la chaussée, ligne des bordures de trottoirs, ligne des murs des jardins hauts comme plus d’un homme et d’où dépassent seulement quelques touffes de branches, lignes des lignes électriques suspendues aux poteaux perpendiculaires. La grosse valise ne semble pas la gêner. Elle avance d’un pas lent et décidé. | Gare routière. Un bus part. Parallèles des montants des vitres. Derrière la vitre, le profil de la femme de dos. Traverse le champ à l’horizontale. Le bus s’éloigne par le côté.

A propos de Laure Humbel

Dans l’écriture, je tente de creuser les questions du rapport sensible au temps et du lien entre l’histoire collective et l’histoire personnelle. Un élan nouveau m'a été donné par ma participation aux ateliers du Tiers-Livre depuis l’été 2021. J'ai publié «Fadia Nicé ou l'histoire inventée d'une vraie histoire romaine», éd. Sansouire, 2016, illustrations de Jean Cubaud, puis «Une piétonne à Marseille», éd. David Gaussen, avril 2023. Un album pour tout-petits, «Ton Nombril», est paru en octobre 2023 (Toutàlheure, illustrations de Luce Fusciardi). Le second volet de ce diptyque sur le thème de l'origine, prévu au printemps 2024, s'intitulera «BigBang». Actuellement, je travaille à un texte qui s'alimente de la matière des derniers cycles d'ateliers.

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