#gestes&usages #09 l écrire est un geste

Écrire est un geste

Geste-dépôt de ma pensée Naïf. Geste par lequel ma pensée se révèle à elle-même Réducteur. Geste-maïeutique de ma pensée Joli mais exagéré. Plutôt : geste qui explore, sonde, sculpte, enrobe, trahit ma pensée. Geste de liberté à jamais contraint. Geste de révolte toujours entravé. De résolution qui toujours sépare. Geste-témoin, toujours dénature. Geste, pauvre geste de mon incomplétude, la parfaite constance de tes échecs à combler l’abîme qui m’habite force le respect de l’être inconstant que je suis et m’interdit de te haïr.
Écrire est un geste qu’il nous faut pardonner.

Printemps 1988. Collège Jean Moulin. Jean-Rémi, un copain de classe, trace dans mon dos, du bout de l’index : Je t’aime. Paniquée, je dis : je n’ai pas compris. Le pauvre recommence, deux fois, puis abandonne.
Écrire est un geste malheureux.

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Hiver 1991. Lycée Jules ferry. Une jeune interne trace en lettres immenses sur le tableau noir de la classe déserte, cinq lettres : S.E.U.L.E.
Écrire est un geste tragique.

Et l’air a l’air d’être un soupir d’automne / Tant il fait doux par ce soir monotone / Où se dorlote un paysage lent.
Écrire est le vrai geste prométhéen.

4 commentaires à propos de “#gestes&usages #09 l écrire est un geste”

  1. déjà illustrer d’emblée le geste d’écrire comme quelque chose de mouvant, quelque chose de non définitif qui peut être malaxé raturé bousculé
    merci Natacha pour ces paragraphes inattendus qui composent finalement une suite tragique
    ah le dire et l’écrire nous poussent dans nos retranchements et souvent au bord du gouffre…

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