Artère vers l’enfer

7h32. D’abord il y a la petite pente, puis le petit rond-point, puis les petits commerces sur la droite. Tabac, boulangerie, coiffeur. Ils longent le début de la grande route qui mène au prochain rond-point. Mais ne nous pressons pas. Suit alors la boucherie où je n’ai jamais mis les pieds, puis l’Intermarché, dont l’odeur nécessaire me détruit encore les bras. De l’autre côté de la route, des logements sociaux, j’empressais alors toujours le pas quand j’y passais, il était mal fréquenté. Mon premier amour d’ailleurs en vient. Cette route est longue et ennuyeuse. Retraversons -d’ailleurs il n’y a pas de passage piéton- pour nous retrouver dans le concessionnaire Renault, dont le garagiste acceptait de regonfler les roues de mon vélo, et me braillait dessus quand j’oubliais de dire merci. Suit le rond points et la maison au chien, qui braille lui aussi, il devait être parent du garagiste à n’en pas douter. Et nous y voici. L’artère vers l’enfer. Elle se tient là, en faux plat, cette saloperie de route trop droite pour y laisser sa confiance. Qu’importe le bonheur ou l’énergie que j’avais chargé en moi, je savais qu’au bout, elle serait évaporée. J’emboite le pas, suffoque, en remontant comme à contrecourant le fil de cet interminable fleuve. J’y parviens contre ma santé. Tiens, voilà Hadès, il se tient bien droit, les bras croisés et en tenue de sport, gardant l’entrée du royaume des morts. Il me demande ma carte. Je pénètre l’enceinte du collège, les copains sont là. 7h54.