Boulevard des souvenirs

Ce long boulevard, ce grand boulevard : boulevard des Anglais. Cette longue route bétonnée ; d’un bout à l’autre, environ trois kilomètres. Elle commence par le collège de mon frère : assez petit, petite cour, petit parking… Sur ma gauche, viennent ensuite des maisons, encore des maisons, un parking. Ah ! La maison des associations sur laquelle est écrit, tout en haut, gravé directement dans la pierre « École supérieure de garçons ». Une école juste pour les garçons ? C’était comme ça avant ? Je continue de marcher, lentement, je respire l’air frais, je respire. Ah ! Une odeur désagréable, nauséabonde ! C’est normal, je suis à côté des poubelles du quartier. Je continue mon chemin ; des maisons aux façades grises et blanches, certaines sont petites, d’autre plus hautes, certaines n’ont qu’une boîte aux lettres devant le portail, d’autres en ont trois ou quatre, certaines ont un beau jardin, d’autres n’ont même pas eu le temps de tondre la pelouse… Sur ma droite, deux petits sièges en pierre avec une assise en bois ; je m’assieds un petit instant, je suis face à un petit carré d’herbes, des petites poules picorent, je lève mon regard et là ! La montagne, la belle Dent du Chat se dresse face à moi, ses sommets légèrement recouverts d’une poudre blanche glacée. Huit heures dix-neuf, je vais être en retard. J’accélère le pas, je passe encore devant des maisons, petites, grandes, volets bleus, volets verts… Sur ma gauche, une rue descend ; c’est ma rue, plus précisément, mon impasse, je vis là. Je continue, je passe devant cette maison beige aux volets marrons, c’est la maison de mon copain Igor. Je presse le pas, encore un peu, je passe devant ce portail vert où les chiens aboient comme si j’étais leur repas. La maison juste à côte, au portail blanc, a quant à elle, un gros chien noir, tout doux, tout gentil : une peluche vivante. Huit heures vingt-cinq, je cours. Sur ma gauche, défilent des maisons encore et toujours. Cette fois-ci, c’est un grand pré. Je cours un peu plus vite ; au bout de ce pré, un panneau indiquant « Prochainement, construction de quinze habitations » : il n’y aura plus ce pré. Je suis essoufflée, j’entends la cloche sonner, je passe le portail, je me mets en rang deux par deux. Silence ! L’école va commencer.