Au cimetière.

On est arrivé ensemble. On ne se connait pas. On a garé la voiture. Elle descend avec difficulté de la sienne, c’est la troisième fois qu’on se retrouve là on dirait qu’elle va travailler au jardin, des gants renforcés, un panier plein on voit une plante qui dépasse elle avance d’un pas tranquille et me fais à peine un sourire passe la grille et attrape un seau plastique plein d’eau.Tout autour, l’horizon à 360° tout est là le ciel gris bleu plein de nuages épars les hirondelles sont arrivées tout est là du vent toujours du vent la campagne tout autour la même que là-bas pas vraiment la même mais quand même la même apaisante vivante les arbres tremblent avec le vent tout si calme et pourtant tout palpite il pleuvine un peu à peine il fait froid son imperméable la protègera il n’y a aucun bruit aucun un silence pur puis tout doucement il devient profond entier du soleil à peine elle se penche vers la tombe et reste immobile son mari vient sans doute de mourir à son âge c’est probable le vent la décoiffe sans arrêt elle remet ses cheveux derrière les oreilles on a envie d’aller vers elle qui perd l’équilibre un instant s’assied sur le bord de la pierre elle va doucement d’avant en arrière comme pour se bercer comme si la terre se mettait à tourner je la vois se plier en deux sans comprendre ce qu’elle fait sur le côté une urne un peu de travers, peut-être s’est-elle décollée ça arrive pourquoi ne l’ont-ils pas enterrée elle se ranime un peu et elle oui c’est cela elle prend — mais que fait-elle — elle ramasse — on dirait — dans ses mains — des cendres — des cendres répandues — tranquillement elle les remet dans l’urne je n’entends pas ce qu’elle dit elle parle comme à un enfant comme on berce un enfant sa bouche est si près on dirait — on dirait qu’elle va — oui manger la cendre ——— c’est son enfant qui est là ——— sûrement elle l’a porté mis au monde fait grandir et il est là elle essuie méticuleusement la cendre ne veut pas en perdre un grain je repars avant elle qui va sans doute rester longtemps là avec ce grand ciel au dessus d’elle et en dedans d’elle ?

3 commentaires à propos de “Au cimetière.”

  1. Le dedans de la tombe c’est l’œil insondable qui le perce jusqu’à ces blancs pour dire des gestes comme suspendus. Merci Simone Wambeke.