autobiographies #11 | objets

Autobiographie 11 Objets. 

Un mouchoir. Carré aux lignes bleues, croisées noires. Un au-revoir agité. Talisman d’hiver et d’été. Penser aux noeuds, se rappeler, penser aux noeuds aux quatre pointes sur la tête. Noeuds coulants. Penser soleil. Le tordre. Sa place sur la poitrine,  dans la poche de la vareuse bleue. Un morceau de coton tissé à l’écoute des humeurs du corps. 

Un peigne. Un objet en nacre ou en écaille.  Mais pas celui auquel vous pensez. Déposé le soir sur le marbre de la coiffeuse. Une transparence dans les cheveux. Un espoir d’ascension sociale quand il est serti de perles minuscules. Il sépare et maintient, dompte les mèches rebelles. Il ordonne. Gémellité, accroché de chaque coté de la nuque. Oiseau de jour. Comme l’oiseau, il peut être orné de quelques plumes de couleur…ramage de fête. Déposé le soir, une fois le chignon dénoué, les cheveux laissés à leur sauvagerie. 

Le gilet est une digue. Si la chance de vieillir vous atteint, si la vibration de votre vie ne s’étiole pas, il sera le refuge torsadé de vos formes arrondies, il nivellera la silhouette, épousera les épaules voutées. Feuillage protecteur. Cocon moelleux de laine mohair. Tandis que vos doigts perclus de rhumatismes, inlassablement, s’entêteront à faire danser les brins d’un nouvel ouvrage. Résolus à rendre la gratitude de l’enfance de la bergère. Illusion, évasion un peu de calme au point mousse ou au point de jersey. 

Le chapeau. Aérien, il est avec  sa voilette retroussée. Deux ailes de gaze blanche pointées vers le ciel. Voilette abaissée, le paysage des âges disparait. Finesse d’un cristal, le grillage de ce bibi. Quelle est sa couleur ? Entre le mauve et le violet des robes d’évêque. Se sentir déjà élue, auréolée de pureté. Par sa forme circulaire, épousant la tête, il impose un port altier. Signe de distinction, de haute noblesse, c’est une revanche. 

Couteau ou canif. D’un bref coup de la paume de la main, on dissimule sa lame. Il y a du vagabond dans le couteau, sur la nappe à côté de l’assiette, dans le jardin déracinant des pissenlits, sur les chemins taillant les branches d’osier. Il y a de l’ami fidèle dans la poche du pantalon, poli sur le tissu, perpétuellement là, toujours disponible. Il y a cette virilité qui lui est attachée. La main du chef de famille qui tranche le pain. Il y a de l’honneur à défendre. Il y a aussi de l’artisan, de l’agriculteur, du prolétaire. Il est peuple. 

Catherine Guillerot-Renier le 21/02/2022

A propos de Guillerot Catherine

Enfance entre Berry et région parisienne. Étudiante à Paris VIII Vincennes en littérature, philosophie et Français Langue Étrangère. Enseignante en Lycée Professionnel pendant 17 ans dans divers coins de France , puis en Collège et en Lycée. Quelques années à Mayotte dans l’Ocean Indien. Amoureuse des mots, du théâtre, de la nature. Voyageuse sur les océans et sur la terre. Ai écrit deux livres « Dialogue avec Jean » et « La traversée d’Ariane ». Fréquente la Maison Gueffier, à La Roche sur Yon lieu d’échanges et de rencontres extraordinaires avec des écrivains contemporains. Ai animé des ateliers d’écriture à la bibliothèque où je suis bénévole.