#40jours #29 | culture pub

Je suis de la génération Y. Ivre de l’hyperconsumérisme, malade de la malbouffe et boulimique  de télévision. C’est ainsi.Toute une strate du disque dur de ma mémoire est gravée de films publicitaires C’est ainsi. Tour de babel. Ainsi soit-il. Ba ba ba ba ba ba bybel… Est ce ma faute si les Beach boys  sont associés à tout jamais à un fromage? si Roger Glover est pour moi une sauterelle psychédélique qui descend un fleuve de sirop à bord d’une gondole? Si le boléro de Ravel m’est apparu populaire par le biais d’une banque? Culture pub? Sous culture? Mais pourquoi êtes vous si méchants? Secouez moi sinon la pulpe elle reste en bas. Je garde de cette époque une sensation cotonneuse de bien être. Drogue dure distribuée en toute légalité à la sortie des écoles. Décharges pulsatiles  d’endorphines de ce paradis merveilleux ou tout est si facile, si accessible visage réjoui de la vache qui rit que je rejoins après un shoot de poudre blanche de sucre devant mon bol de y’a bon banania ou d’ovomaltine c’est de la dynamite à l’heure du goûter. 
Il me fallu longtemps pour me désintoxiquer. 
On est pas sérieux quand on a 17 ans, faute de lire Rimbaud et puisque l’adolescence a un vernis qui part au premier coup d’ongle  de publicitaire un tant soit peu averti, j’ai choisit d’écrire ici une des meilleures séances d’anesthésie des sens qui me fut permis d’expérimenter. Le visionnage m’en laisse une douce nostalgie teintée de schizophrénie…


La musique est planante ( dès les premières notes je m’envole/encore un groupe qui n’aura vécu que l’instant éphémère d’une publicité) Sensation renforcée par les travellings caméra ( secousses dont je suis clairement l’épicentre qui fissurent mon libre arbitre/ c’est quoi ces gros plans sur du fromage?). La voix, pleine, pure, I am dreaming that I am flying ( fait céder mes dernières résistances à entrer dans l’image/ comment ai je pu aimer cette soupe pop- rock?) C’est un bel après midi d’automne. Froid sec, soleil éclatant. Une bande d’adolescents se promène en pleine nature ( moi je zone devant la télé/ Des ados sans smartphones?? Admettons nous ne sommes que dans les années 90) plus tout à fait des enfants, pas encore des adultes Ils sont beaux , ils sont jeunes, ils sont libres (pourrais- je un jour avoir une telle assurance ?/ ils n’ont pas un bac a réviser ? ). Lui, blondeur de l’enfance regard d’homme, col montant d’un pull de laine sombre qui vient renforcer l’ombre de ses iris ( je suis instantanément amoureuse/ encore un acteur qu’on veut faire passer pour dix ans de moins qu’il n’a…) Elle, déjà femme, regard plus pur que le ciel de l’enfance. Lui, mord à pleine dents dans une part de fromage ( Qu’il est beau/ c’est pas un peu ringard de manger du camembert? Et bonjour l’haleine!) Elle boit à même une bouteille de lait ( soif de vivre/ mais qui emmène une bouteille de lait en pique-nique?) Ils sont affamés d’expérience nouvelles prêt à mordre la vie à pleines dents.La bouteille est blanche immaculée (pureté, innocence/ scandale de l’industrie agroalimentaire, Lactel, Candia et cie, et le prix du litre de lait payé à l’exploitant, et le scandale du bisphenol A, et lactose ou pas lactose?). Leurs regards se croisent puis tout est noir. La lumière revient lorsqu’elle ouvre un frigo ( c’est beau comme un Le Caravage/ qui aurait cru que la fringale de milieu de nuit puisse être un instant a fort potentiel romantique? plutôt propice à heurter un coin de pied de table surtout sans allumer la lumière ?) elle est en chemise noire négligemment entrouverte sur des sous vêtements de coton qui laissent deviner ses formes. Lui est torse nu: la douceur d’une peau imberbe sous laquelle se dessinent des muscles parfaits. La tout s’accélère ( les battements de mon coeur au rythme de la musique/ qui a un frigo aussi bien rangé et remplit d’oeufs de fromage et de bouteilles de lait?). Elle se penche. Lui l’effleure. Elle saisit une bouteille de lait. Lui l’entoure de ses bras rassurants. Elle essuie le lait de ses lèvres puis effleure ses lèvres à lui.( sensualité a fleur de peau/ Ils n’ont donc jamais appris a manger proprement ?)Les corps se rapprochent. Travelling avant. Les lèvres se cherchent ( je plane, shoot d’endorphine, j’en veux encore…/ oui j’en veux encore…)

Les produits laitiers des sensations pures 

A propos de Géraldine Queyrel

Vend des rêves dans la vie réelle Rêve de fiction le reste du temps. Son blog : antepenultiemefr.

13 commentaires à propos de “#40jours #29 | culture pub”

  1. Merci Géraldine pour la description amoureuse mais distanciée de cette pub que je ne connaissais pas…
    Un regard critique sur tes passions.

    • Merci Fil! Je ne sais pas si la publicité est une passion. Une culture peut-être si on se rappelle de l’émission du même nom qui passait sur canal environ à la même époque

  2. Tout lu et vu la vidéo… deux fois, et maintenant j’ajoute un mot à ma liste , perle de lait pourquoi ? J’en sais rien … du coup cet exercice est dangereux , je suis assailli par des guitares des bobines de fil kanthal du camembert président et j’en passe

  3. Formidable! Les deux temps du texte. J’ai connu les shoot années 70 vache qui rit Eram Dim … Bravo