#40jours #35 | Trous

Par ici on excave. On va du dehors vers le dedans. On fore. On troue. Pour bâtir on pose des bases et ça reste en plan longtemps. Quand ils ont rasé la maison on a fait un grand feu, le pommier est parti en fumée avec l’armoire. Un feu sans joie. Dans les rues encore debout, par ici les maisons penchent à cause du sous sol qui remue, on voit des panneaux verts . « Notre ville n’est pas à vendre ». Il y en a un peu partout. Et des amoncellements de gravats. On attend les camions et la benne. Bâtir ça prend du temps. Et partir ce sera quand? Avant il y avait des arbres. Des racines s’arrachent du dessous, on les voit qui remontent les tranchées, certaines comme des mains ou des pattes de griffon. Les plus vieux viennent au bord des trous causer. Ils se souviennent du cèdre géant. Parlent d’un parc où jouaient des enfants. De jardins ouvriers. Des trous on tire des choses; même des jouets et des dents. Bientôt il y aura des immeubles de quatre étages tout blancs, pas des barres, si on troue c’est pas pour les chiens.

A propos de Nathalie Holt

Rêve de peinture. Quarante ans de scénographie plus loin, écrit pour lire et ne photographie pas que son lit.

8 commentaires à propos de “#40jours #35 | Trous”

  1. Un texte écrit à la pelleteuse, au rythme de ses coups de godets, saisissant, et un peu amer – cette proposition semble donner des possibilités de « personnification » de la ville, quelque chose où la forme passive prend vie,