#40 jours#33 | Nominations

La foule court. Trains supprimés au dernier moment. C’est le dernier. Monter comprimés. Espérer rentrer chez soi. Inquiétude.

Gare nocturne, dans une ville accueillante et vigoureuse. Salle des pas perdus, arrivée tardive. Confiance. Une auto-stoppeuse peace – and- love va rejoindre un camp d’été. Trois hommes lui proposent de l’emmener. Ses bagages dans leur voiture. Et ça roule dans la nuit. Montagne, rien à voir avec la bonne direction. Quand la bulle se brise brutalement elle réalise ce qui l’attend. Ciel au secours : un orage. Eclair devant la voiture arrêtée. Ils repartent sous pluie battante vers la ville. Elle sait que la foudre ne tombera pas deux fois. Elle saute de la voiture en marche. La pluie battante adoucit l’instant de la peau arrachée le long de sa jambe. La voiture d’après la récupère. Commissariat de la même ville. Hôpital. Jambe brûlée. Ne pas inquiéter parents, ne rien leur dire. Se débrouiller. Du stop, encore. Une bande de jeunes décide de l’aider. Nous on n’est pas comme eux. On va retrouver les porcs. L’emmènent là où elle doit se rendre. Tu as une bonne étoile ils disent. La jambe finit par guérir, à force de tulle gras. Des années après, elle lit une partie de Millénium. Elle aurait bien pris la place de l’héroïne. Mais n’a même pas porté plainte.  A quoi bon à l’époque… Elle pense à celles qui n’ont pas sauté de la voiture. Celles qu’on n’a jamais retrouvées. Prélevées tard le soir dans la salle des pas perdus, perdues elles-mêmes. Une belle ville pourtant. Réputée pour sa foire aux livres. Effroi.

 Rappel en images, exposition en plein air près des colonnes de Buren : beauté des villes prospères, monastères de l’Ukraine éternelle. Des touristes circulent, jettent un œil attendri et plus loin insouciants se prennent en photo sur les colonnes aux tailles inégales qui disent soudain la mutilation éternelle. Effroi.

La petite enfant souffre de la chaleur. Degrés en trop dans la ville malgré la présence du square proche. Elle ne peut pas comprendre pourquoi la chaleur s’impose comme une autre peau étouffante qu’elle ne peut retirer. Ses parents l’aident à atteindre la délivrance du soir : bain, brumisateur, douces histoires contées pour abaisser la température, éviter l’agitation.  Inquiétude.

Sept poussettes vides sur la place. Et beaucoup d’autres ensuite. Effroicolère

Ce qui reste des colonnes à l’entrée du théâtre bombardé. Effroicolère

Une jolie réfugiée. Des hommes tournent autour à la frontière. Effroicolère

Des trains pour fuir. Le visage d’une petite fille à la fenêtre. Effroicolère

Villes rayées de la carte. Colère.

A propos de Christine Eschenbrenner

Génération 51.Une histoire de domaine perdu, de forteresse encerclée, de terrain sillonné ici comme ailleurs. Beaucoup d'enfants et d'adolescents, des cahiers, des livres, quelques responsabilités. Une guitare, une harpe celtique, le chant. Un grand amour, la vie, la mort et la mer aussi.

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