#40jours #38 | aux confins de…

Frontières limites bornes confins ? Pays territoire lieu ? Et si on les faisait sauter, les frontières, entre nous les humains, tout simplement pour commencer dans notre ville, notre village, notre quartier ? C’est bien le même air, c’est bien la même terre, mais c’est vite différent, dérangeant à deux pas de chez moi.

Un exemple tiré de mon quotidien Ma voisine a un chien qui cherche querelle au mien, il est hargneux, prêt à mordre. Sympa sur d’autres points, elle laisse faire, impossible d’en discuter. J’ai posé des grillages tout autour du jardin pour que Roulotte soit en sécurité. Quand je la sors, je la mets en laisse et la libère plus loin. C’est rien, presque rien, et je m’enferme, et souvent je râle. Agacée.

Un exemple qui vient de loin, en un temps où je faisais des petits jobs, enquêtrice pour l’IFOP, bien payée, organisation du boulot à ma guise permettant de mener des études dans le même temps, intéressante la découverte des autres, les questionnés. Une contrainte : l’échantillon de personnes à respecter. Pourcentage d’hommes, de femmes, de jeunes, de vieux, de cadres, d’employés, d’ouvriers, de retraités… Entrer chez eux, expliquer, écouter, m’étonner : oui, les frontières étaient là dressées, entre classes sociales, professionnelles, d’âge, de langage, entre quartiers rupins et barres d’HLM. Pourtant, c’était la même ville qui nous entourait, Marseille, le même mistral qui soufflait. Des mondes différents se côtoyaient et s’ignoraient, se détestaient. Désespérance.

Aujourd’hui, dans mon territoire, les Hautes-Alpes, une frontière sous haute tension, cols surveillés, Col de l’Échelle, Col du Montgenèvre, Col Agnel, Col de l’Arche, Col de Tende,. Contrôles systématiques à la frontière avec l’Italie, blocages des personnes migrantes et leurs refoulements, notamment des mineur·e·s isolé·e·s et des personnes en demande d’asile. Violations des droits des personnes migrantes. Solidarité et résistance. Maraudes. Citoyens solidaires condamnés pour délit d’hospitalité.

Comment oser associer ces deux mots ? Comment l’hospitalité peut-elle devenir un crime sanctionné par la loi ? Les frontières ne sont plus lieux de passage, d’ouverture vers l’autre, mais interdiction, fermeture, limites à ne pas franchir, dans la peur de l’étranger. Je suis protégée, j’ai honte de l’être

On peut dire aussi : délit de solidarité.

On est en droit de se questionner : le réchauffement climatique, les canicules, l’eau manquante, des zones désertiques bientôt de plus en plus vastes à travers le monde, l’exil inévitable des populations. Et nos frontières, alors ?