#5 – HUIT CENT CINQUANTE MÈTRES

Le train au départ de Saint-Lazare direction Ermont        le train au départ de Saint-Lazare direction Cergy        ligne L ligne J        direct jusqu’à Asnières        omnibus Pont-Cardinet Clichy-Levallois Asnières-sur-Seine Bécon-les-Bruyères Les Vallées        ce passage d’une minute avec les voies de garage en éventail        avec le poste A le poste B        les rails courbes d’aiguillage        les digitales qui poussent là où rien ne circule         les géomètres en gilets jaunes        le SERNAM déteint sur l’entrepôt en brique        les wagons à bestiaux        les cônes de ballast sous la pluie        cette emprise qui s’enfonce dans Clichy avec ses Intercités normands à l’arrêt        ses petits gris remisés        ses locomotives sans wagons        Le 18 septembre 1906 5 rue des Cailloux la maison collée aux rails c’est là qu’il est né        les vapeurs direction Rouen Dieppe Fécamp la suie autour des yeux de Jean Gabin        18 septembre 1906 l’existence débute là        l’existence avant le cor dans l’harmonie municipale        avant le service à Strasbourg        avant le mariage de 1930        avant celui de 1933        avant le garage de Constantine        avant la tôle des avions Bloch        18/09/06 le premier cri        à cent mètres le pont d’Asnières        le traversant au couchant voici La Défense le verre que le couchant irise l’acier que le couchant argente        à cent mètres du pont le cimetière sous les marronniers – pour les couleurs choisis ta saison – l’omnibus comme le direct le dépassent à vitesse moyenne        c’est là que dort depuis 1990 l’enfant de 1906        ce que la J et la L enjambent c’est le passage d’une vie de quatre-vingt-quatre ans        huit cent cinquante mètres du berceau à la tombe huit cent cinquante pas un de plus.

A propos de Xavier Georgin

Xavier GEORGIN est auteur, animateur d'ateliers d'écriture et membre du collectif La Ville au Loin (https://la-ville-au-loin.fr/). Il écrit des textes où se rencontrent histoires familiales et traces dans l’espace urbain puis les met en son et en images sur son site internet www.xaviergeorgin.fr

2 commentaires à propos de “#5 – HUIT CENT CINQUANTE MÈTRES”

  1. ah ben nous voilà rendus au bout de ses 850M, avec la chute vraiment poignante, (me rend compte que le mot chute colle pas du tout, j’y vois plutôt comme une ouverture soudaine ) un trajet de vie en somme, ça change des tranches peut-être trop vues, je ne sais pas, ces blancs m’interrogent mais là, je les trouve bien à leur place sur ce chemin ferroviaire.