À rebours

À rebours. Ça commence – commencer, premier verbe – par la fin, par maintenant. Naissance arrivera – arriver, 2e verbe, on les comptera pas tous, quand même, même si – en dernier. Je sera peut-être pas nécessaire. Je jamais plus encombrant que lorsque absent. Ainsi toujours faire – faire quel verbe plat – le contraire, même pas par défi, franchement non. C’est naturel, presque. Puis pas tant, au fond. Comme dans : ne pas vouloir et en même temps vouloir être dans le moule – ça reste deux fois vouloir, et ça reste une définition du je absent. Drôle d’affaire. Donc ça commence (tel qu’écrit) devant l’écran cette histoire d’introspection sous verbe, meilleur endroit, et le moins cher, pour s’introspecter. Allons-y. Septembre 2019, atelier d’été, 47 tirant sur le 48, jamais mariée pas eu d’enfants laissé l’emploi trouvé des mots. Pris des vacances, vu le fleuve, lu Virginia, médité sur « la forme, donc, est la notion qu’une chose succède correctement à une autre». Relu : « la forme, donc, est la notion qu’une chose succède correctement à une autre». Aimé. Beaucoup. Pendant plusieurs décennies comme toutes comme tous aimé tant bien (Martin, Paul) que mal (Réjean, Bozo le Clown – jamais su son vrai nom, ce con – puis JP), bu modérément, si, même pas de mérite, vu du pays, un peu, passé les ceintures de blanche à noire, couru les miles ou les kilomètres selon les lieux, pleuré à chaque arrivée. Puis et surtout pas écrit autant que souhaité, car travaillé pendant vingt ans, moulée dans un mauvais casting, sans pourtant y avoir été (avoir été, en principe on éviterait, mais là c’est ça) forcée, assise dans un bureau sans fenêtre aux murs grèges, mais c’est le grège le pire sans doute. Surtout pas assez lu, car jamais assez lu, car lire plus satisfaisant qu’écrire, toujours, voilà que commence la phase des jamais et des pas assez et des toujours, jamais bon signe, va mal finir, comptons les verbes, tiens, une petite trentaine?, que ça? et pas des plus recherchés, mais les principaux y sont, puisque peu servent à décrire le cœur d’une vie, donc à rebours reste ceci, étudié à Aix les lettres, à Montréal les images, un peu avant un peu ailleurs, mais peu importe où, toujours cette sensation, étrange, diffuse, centrale, d’être à une distance pas si éloignée de la mort, comme à 25 ans au milieu de la forêt, à 16 ans au volant de la première voiture, à 8 ans devant le cercueil de la mère, à 4 ans devant la mère sans cheveux, puis à un jour à l’hôpital, cette quatorzième journée d’octobre 70, où l’histoire commençait avec des pleurs, mais ce serait dommage de finir sur le verbe pleurer.

A propos de Julie Bouchard

Née à Montréal. Y habite toujours. Mais est-ce que cela dit vraiment quelque chose sur quelqu'un? Le 18 février dernier a tout balancé (enfin, principalement l'emploi) pour écrire en quelque sorte "à temps plein". Mais c'est pas gagné. Et c'est ça qui est merveilleux.

11 commentaires à propos de “À rebours”

  1. Pleuré à chaque arrivée, c’est bien de finir sur le verbe pleurer à l’arrivée du texte.

  2. J’aime beaucoup votre écriture vive et pensive en même temps … Et vos apartés entre parenthèses – ou sans parenthèses – me font sourire et me touchent.

    • et j’aime la façon que vous avez de circonscrire (en vive et pensive) qui me porte à réfléchir, merci pour la lecture

  3. (non, pourtant, le grège – parfois – c’est joli aussi) (je me disais que rien n’est jamais manqué tout reste à faire) (j’aime les illusions) (magnifique rebours)

  4. de La boîte en carton recyclée (impossible de glisser un commentaire dans la boite) à votre À rebours, cette Liberté, cet humour grave. Toute cette Vie qui remue. Votre ton si singulièr, cette façon que vous avez d’avancer un rebroussant comme dans les cinq temps de la boite.

    • Et très fort Marie (impossible de glisser un commentaire) ce parpaing dans la litanie d’un nom et le remous d’une vie.

      • et ces commentaires, comme les vôtres, si généreux, qui nous font voir nos textes autrement, merci (grande affinité également pour vos écrits), étonnant aussi comme la voix des autres nous apparaît toujours plus singulière que la nôtre