#Atelier d’été 01 bis# L’empereur.

Je le voyais, l’empereur, le Napoléon, surgissant- mais lentement -, le bicorne d’abord, ce carton bouilli luisant, « guardia civil », la tête petite, la mèche barrant le front, la redingote, ou le manteau, comment dire pour un chef de guerre ? je pensais aux autres portraits, tête nue, sauvagerie du regard, visage de beatnik aux cheveux fous ; contre-plongée, couché dans l’herbe, sur le ventre, l’observer émergeant du sommet de la colline en friche, à-pied, sous la redingote- ou le manteau- le gilet blanc, contient son ventre, au-dessus de ses bottes noires ; le film défile, quatre tambours, le suivent – il n’y a pas de son – puis les grenadiers, bonnets à poil, moustaches, énormes, barrent les visages tannés.

L’image, dont j’avais fait un film, un paragraphe, venait de Richard ; oui, c’était Richard, il avait dit le nom, Napoléon ; image qui concluait un long périple, longue pérégrination dans Paris, il fallait un point de départ…

Vincennes, Moby Dick- or The Whale – fouiller ensemble ce monstre en noir et blanc, apporter sa pierre aux thèses d’une américaine venue nous ouvrir les mâchoires de Léviathan ; ils étaient devenus amis ; tout s’accumulait, bouillonnait, Richard devenait passeur.

Manquait le déclic.

France Inter ( ?) organisait un concours de nouvelles, les mots (quatre substantifs…) devaient apparaître dans le texte ; un dimanche après-midi, avant de foncer vers la Gare de l’Est, je me suis lancé ; je jubilais, tout y passait, le boulot, la prise de parole  du lendemain, Vincennes, l’amitié avec Richard, nos virées à Charleroi, les paysages familiers, Eve et Albert au Luberon ; je pissais des phrases, structurais par moment, coupais, recollais, cherchais dans le stock, tâtonnais, retombais sur mes pieds, ouvrais des portes jusqu’alors fermées, organisais le périple, appelais l’image de Richard quitté devant un pilier de la Gare St Lazare, ses cheveux comme imprimés sur le granit ensoleillé, attrapant au vol mon train pour Chaumont, superposant le viaduc aux aqueducs romains de Ségovie au Pont du Gard, jusqu’à l’apparition du Petit Caporal, d’où sortait-il, celui-là ?

Maintenant tout est là, comme flouté par le temps qui passe ; écrit, le texte ne ressemble à rien, c’est sa force… ?