A propos de Juliette Keating

Vit et travaille en région parisienne. Autrice, elle a publié un roman "Awa" (éditions le Ver à soie), un recueil de portraits de jeunes gens illustré par Béa Boubé "Blaise, Léa et les autres…" (éditions Libertalia) et deux romans jeunesse (Magnard). Contributrice à la revue culturelle délibéré.fr.

carnets individuels | Juliette Keating

#01/40 Vadrouille pour photographier des animaux en ville mais, dans la brume piquante, d’animal aucun. Sinon dans cette rue en pente douce, un gros chien noir. Sa grosse bonne tête, sa truffe humant le bas de mon imper. Pas de photo, on a parlé. 02/40 Pas de souvenir du jour où ma première sœur est arrivée, où mes parents l’ont amenée Continuer la lecturecarnets individuels | Juliette Keating

#photofictions #09 Hors-champs

Hors de l’immensité des champs qui s’étalent de l’autre côté de la route, hirsutes après la moisson. Structure métallique rouillée, remplage de briques, inscriptions affadies. A peine distingue-t-il le mot SILO en lettres majuscules au pochoir. Bâtiment industriel de cubes empilés. Au faîte: un campanile raccourci. Vieux silo à démolir, lieu du fait-divers. Le photographe devine ce qu’on voit de Continuer la lecture#photofictions #09 Hors-champs

#40 jours #37 L’appartement

impossible pèlerinage non seulement par jouissance retirée mais seront démolies ces pièces qui t’ont accueillie autant que tu les as accueillies comme un corps aimé puis moins aimé puis quitté; casse des cloisons avant remembrement effacement des circulations entre les pièces destituées réaffectées pour d’autres vies que les vôtres d’autres usages d’autres voix; opérations programmées sur le corps de l’appartement Continuer la lecture#40 jours #37 L’appartement

#40jours #30 | fragmentaires

Beauté qui habite la ville n’a pas d’adresse pas de lieu où résider elle erre par les rues visible seulement les nuits assez noires pour illuminer les rêves. La nuit sœur de beauté habite la ville chaque trottoir sous chaque lampadaire laisse trace de passage contre une aumône aux vents. Beauté des façades sans charme usées de pluie comme larmes Continuer la lecture#40jours #30 | fragmentaires

#40jours #28 | Inhibiteurs

Savoir ne pas savoir en entrant dans l’officine celle que tu aimes pour son parfum de savon naturel aux plantes savoir que tu ne sais rien de plus que ce qu’on t’a dit à l’hôpital tout en tapant au clavier la prescription savoir que tu ne sauras rien de plus que les bribes de vulgarisation sur les tumeurs leur corrélation Continuer la lecture#40jours #28 | Inhibiteurs

#40 jours #27 C’est quelle origine, ça?

C’est quelle origine, ça?Tu t’es encore vexée.Pas vexée, non, pas question d’amour-propre de fierté. Mais ce ça. Qui revient dans leur question. Moi comme un ça ayant une origine.Le ça des choses.Le ça d’un tout qui est cette personne qu’ils croient tenir dans les crochets de leur question. Pas le vous ni le tu. La troisième personne de ce qui Continuer la lecture#40 jours #27 C’est quelle origine, ça?

#40jours #25 #26 | attendre son jumeau

Les voitures avancent au ralenti dans le carrefour avenue fréquentée et rue de traverse, croisement dangereux: conducteurs foncent musique à fond, tournent sur les chapeaux de roues, ne respectent pas le feu qui, ce matin, n’est qu’un mât aveugle bandé d’une gaine de plastique noir. Frontière de deux communes de banlieue à l’écart des centres que l’on rejoint aux bouts Continuer la lecture#40jours #25 #26 | attendre son jumeau

#40jours #23 | traversée

Le plus court chemin d’un point à un autre est la ligne droite sa grand-mère lui répétait l’adage quand perdue dans les circonlocutions elle peinait à réclamer une faveur: sucrerie jouer chez les voisines la fête foraine la piscine où il fallait se rendre en voiture. Droit au but! Qu’est-ce que tu veux? Le message clair restait prisonnier de sa Continuer la lecture#40jours #23 | traversée

#40jours #21 | dix protocoles à suivre méticuleusement sous l’abribus

1) Saluer respectueusement toutes les personnes qui attendent. Demander comment ça va. Suivre le protocole sous tous les abribus d’une ligne aller-retour.2) S’allonger parfaitement propre et bien vêtue sur le banc. Fermer les yeux, ne pas bouger, ciller, ni répondre aux questions aussi longtemps que possible.3) S’asseoir comme pour attendre le bus. Toutes les heures se lever saluer et réciter Continuer la lecture#40jours #21 | dix protocoles à suivre méticuleusement sous l’abribus

#49 jours #18 Rentrer la nuit

Rentre chez toi dans la dernière rame embarquée quand regrette le verre de trop l’ultime parce que c’était les amis et le vouloir rester ensemble pas soûle à en perdre conscience à tituber pas ça mais cette griserie lourde à cause de quoi pâteuse gauche tu dois faire plus attention à ce qui t’oriente te désoriente vigilance de tes sens Continuer la lecture#49 jours #18 Rentrer la nuit