A propos de Nicolas Bleusher

A publié en janvier 2019 L’embarcadère aux éditions Jacques Flament, un recueil de textes courts sous-titré Confidences, fantaisies et autres curiosités à la fenêtre. Suivi, en 2024, de Vers midi moins gris (77 textes courts et une nouvelle), en auto-édition et impression à la demande, chez TheBookEdition.com

#enfances #01 | Croquis brefs

La main à quatre doigts, roses et décharnés, de Gaston. Son mégot de tabac brun qui tremble un peu entre le pouce et l’index. Son œil serré, bleu pâle, qui me scrute avec malice. Au bord du cendrier. Le docteur Garrin c’était la sacoche en cuir, le bruit de la boucle rabattue, une voix douce, économe, un peu joueuse. Ce Continuer la lecture#enfances #01 | Croquis brefs

La fontaine au fond du jardin

Marquer la page fermer les yeux, convoquer le chuintement clair de la vieille conduite, le filet transparent tout torsadé de lumière, les éclaboussures les bouillons les remous au centre de la vasque, penser l’hésitation des ridules avant qu’elles ne versent dans l’obscurité, entendre — et par bribes d’abord — la fontaine au fond du jardin, les glouglous les tressaillements les Continuer la lectureLa fontaine au fond du jardin

Tandis qu’Ella

Sur le comptoir en acier brossé. À côté de la tasse de café noir, déjà bu. J’ai ouvert le Moleskine aux pages ivoire lignées de bleu. Mon jardin circulaire, ma chapelle, mon atelier jaloux. Derrière le bar, celui qui doit être le propriétaire termine un Crottin de Chavignol sur une tartine grillée. À l’autre bout, une femme épaisse – mauvaise Continuer la lectureTandis qu’Ella

Trois jeunes tambours

Celle qui m’accueillait au bord du lit, chambre en ville, trottoirs sous la nuit, avec du thé et le porte-monnaie de Michel Jonasz, son pinceau de poil de martre et ses pièces de un franc usées. Celle qui, pour m’endormir, fredonnait Trois jeunes tambours. Celle qui n’avait pas d’âge, ses robes imprimées, enveloppantes, qui nous racontait sa guerre avec humour, Continuer la lectureTrois jeunes tambours

BADAM

C’est un jeu de regards dans la chaleur tournante d’un Intercités reliant — badam, badam — Saint-Lazare à Cherbourg. Il est monté à Bayeux avec ses vingt ans et une — badam — jolie timidité cerclée d’écaille. Je l’observe — badam, badam — depuis la page Économie & Entreprise. Il replonge — badam — sans sourciller — badam — dans Continuer la lectureBADAM

VOYEUR

Entre deux lames VOYEUR meurtrières idéales traces de toiles d’araignées VOYEUR l’œil oblique VOYEUR dans la nuit chaude le bruit clair des conversations VOYEUR intimités fenêtres ouvertes VOYEUR de l’autre côté de la rue VOYEUR contre les façades la lumière jaune d’un lampadaire VOYEUR parfois le torse nu VOYEUR le filet de poils bruns du jeune homme insouciant VOYEUR l’hiver Continuer la lectureVOYEUR

Dans la peau tendre des genoux

À la faveur d’un air de musette proposé, sans logique, par le service de musique en ligne : mon père ou plutôt l’image tronquée de mon père, assis, déployant devant mes yeux d’enfant le soufflet de son vieil accordéon — odeur de grenier dormant, respiration d’asthmatique et premières sonorités, aiguës, plaintives, sorties du monstre ramassé — cherchant, maladroit, désolé, les Continuer la lectureDans la peau tendre des genoux