autobiographies #12 | Dans sa cuisine

C’est certainement la pièce maîtresse de la maison, celle par laquelle on entre dans la maison par un petit sas d’entrée, et celle qui distribue les autres pièces du premier étage. Deux grandes fenêtres sur le pignon, la clarté qui entre par cet endroit où tout se prépare, tout se mijote, tout se mitonne. Il y a un grand tiroir dans la table en formica des années 50, un tiroir qui permet de ranger les couverts, le tire-bouchon qui sert à ouvrir les bouteilles de Henri-Maire. Il y a ce panier à salades en acier qui permet d’essorer la salade en la secouant très fort. Il y a cet Opinel pour aller cueillir les légumes du jardin après la cour aux poules et les éplucher en revenant. Il y a un gaufrier qui ne sort que les après-midis où il y a de la visite. Car elle est passée maîtresse dans l’art de faire des gaufres, à toutes les saisons, sur tous les fronts des petits goûters qui se prennent aussi en été. Des gaufres fines et souples qui se dégustent avec un thé, un café ou un chocolat chaud. Il y a aussi ce Thermomix des années 70 qu’elle utilise pour fabriquer quelques petites sauces. Elle est loin d’être un gâte-sauce, bien au contraire, c’est un maître queux dans l’art de confectionner des sauces grands-mères ou des sauces bonnes femmes pour les coquilles Saint-Jacques à Noël. On s’en lèche encore les doigts. Il y a ce coupe-viande électrique qu’elle sort le dimanche pour le gigot/flageolet ou le rosbif/haricots verts du jardin. Deux viandes qu’elle sait préparer avec ce petit bout d’ail qui fait la différence quand on tombe dessus par inadvertance. Les torchons ne servent pas qu’à essuyer la vaisselle. Elle les utilise quand elle fait un gâteau roulé à Noël, une génoise qu’elle roule pour l’enrober d’une crème au chocolat et qui sert de bûche le 25 décembre. Il y a cette boîte à bonbons bleue, octogonale, qui renferme des truffes, toujours à Noël, des truffes roulées dans le meilleur cacao que l’on écrase sous la langue. Dans le saladier en verre, il y a la salade, mais il y a aussi les îles flottantes, d’imparfaites petites boules de neige montées avec le fouet électrique et dégoulinantes de caramel, et leur crème anglaise vanillée. Pour les ramequins en verre Arcopal roses, ce sont des fraises du jardin en salades de fruits qui finissent les repas, même quand on n’a plus faim. Sinon, ce sont des œufs au lait. Le grand couteau à pain dans la corbeille à pain, le couteau à fromages pour le plateau de fromages copieux, et les plats en inox pour les poissons, les viandes, et les légumes qui font des repas copieux, très cuisinés, très popotes et bien mitonnés pour tous les jours, et encore plus pour les grandes occasions. Dans la cuisine, il y a ce placard où on empile les verres et les assiettes, à côté du sucre, de la farine, des œufs des poules du jardin et de la levure qui font de bons gâteaux, mais surtout de bonnes gaufres ou de bonnes crêpes. Il y a ces mousses au chocolat avec de vrais morceaux de chocolat dedans qui attendent dans un saladier, dans le réfrigérateur, que les grands repas se terminent pour être dégustées avec les doigts ou dans des ramequins pour les moins pressés. Il y a ces petits verres, des petits ballons dodus pour déguster et faire un canard avec le père Magloire au moment du pousse-café. Il y a cette cafetière culottée qui sert à faire du café sur le gaz, dans la cuisine, et qui finit chaque repas sur une note douce-amère, et surtout très aromatisée. Il y a ces grands repas qui s’éternisent toujours et qui finissent sur un 4.21 où elle triche copieusement après avoir régalé tous ses invités.

A propos de Elise Dellas

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