Photofictions #09 La Chapelle aux Choux

Une troupe d’enfants rangés par deux avance, en accordéon sinueux, sur le côté droit de ce chemin, chapeau de soleil sur la tête, la plupart chaussés de Palladium bleues et d’un short marine ou rouge. Ils se sont mis en route après la sieste, il fait très chaud ce 22 juillet 1969 et les deux kilomètres et demi pour aller du château d’Amenon à La Chapelle aux Choux sembleraient interminables sans la promesse de pouvoir dépenser un peu de l’argent de poche, confié par les parents et conservé dans une enveloppe par la monitrice, dans l’épicerie de La Chapelle aux Choux et son assortiment de bonbons, chocolats, gâteaux ou cartes postales. Ils chantent en marchant (est-ce que ça existe encore ?) pour l’entrain et le rythme et ne pas penser à la fatigue, le répertoire est maintenant connu, trois semaines se sont déjà écoulées au château. Depuis 1963 une mairie communiste, à peu de frais et même parfois gratuitement, permet aux enfants de partir en vacance un mois, dans un château (avec des tours…), entouré d’un parc planté de séquoias. Derrière le château un grand escalier descend vers d’immenses pelouses sur lesquelles on peut se laisser rouler de haut en bas, couché sur le côté, celle qui ne se relève pas suffisamment tôt un autre lui tombe dessus. Les dortoirs, filles et garçons séparés, sont dans le château pour les plus jeunes ou bien à l’extérieur dans les « Communs », pour les plus grands. Les Communs, joli nom qui ne faisait déjà plus sens. Chaque enfant a reçu un trousseau, linge de corps, short, tee-shirt, tennis, égalité, fraternité. Ce matin, comme chaque jour après le petit déjeuner, le rituel de la « cure de santé » (si désuet) pour la mise en forme, il faut courir, faire quelques mouvement de gym, passer sur des jets d’eau puis s’allonger pour la détente. Demain matin sera différent, après le petit déjeuner, la télévision sera installée dans le réfectoire pour regarder Neil Armstrong marchant sur la lune . Le château d’Amenon a changé de propriétaire et propose depuis 2019 des « Chambres d’hôtes de charmes » : Au cœur d’un parc de verdure à seulement 20 mn du zoo de la Flèche, ce Château du XIIIe siècle offre un cadre authentique et paisible pour découvrir la Sarthe et ses alentours. Bien-être et raffinement y règnent en maîtres.

A propos de Isabelle Charreau

j’arpente plus facilement les chemins de terre que les pavés de la ville, je fréquente l’atelier pour le plaisir comme des gammes, sans projet de partition