autobiographies #08 | surplomb

sur les petits écrans défilent sans fin des images ; toutes différentes ; alignement de visages masqués ; anonymes ; parfois reflet sur écran éteint ; dans la maison au bout du chemin ; juste avant la forêt ; Underhill Vermont ; 44.543663,-72.916839 ; les nuages courent vite vers le NW ; écran 10″ ; Zoom du lundi 8 novembre 2021 ; 1:05:41 ; Moi je veux bien ; Catherine Le Forestier lit le texte point virgulé de Clarence Massiani ; voix tant écoutée ; il y a longtemps ; perdue d’ouïe ; recherchée souvent ; retrouvée ici ; 800 km/h 36 000 feet ; au-dessus de Terre Neuve on pique plein sud sur Washington DC ; 52:28 ; UP a anonymisé ses adresses ; rendre le monde moins repérable ; processus compliqué ; Impression bizarre de n’être nulle part ; pas parti on n’arrivera jamais ; six heures passées deux heures encore ; comme si le monde avait perdu réalité ; 35:50 ; EC certainement dans le 11ème ; lit la mort du petit Luis ; que c’est beau ; HB peut-être au Portugal la remercie avec tendresse ; Luis ne fera plus jamais l’avion ; la jeune femme à côté de moi ; sourde et muette ; négocie avec l’hôtesse ; écrit les mots sur son téléphone ; photographie ce qu’elle voit du hublot ; le situe sur une carte ; ce sera récit très documenté de son voyage ; 35:00 ; on le voit pas à l’écran ; 33:46 ; LD n’a pas écrit le mot porte ; mots et photos se télescopent pour dire le monde ; il va neiger ; 20:14 ; FB feuillette le carnet d’adresses de la jeune mère togolaise rencontrée ; Togo ; Halifax ; Atakpamé ; saint Jean de Terre Neuve ; Bangor ; Bridgewater ; Lomé ; 19:40 ; au Bengale Sumana Roy traduit nos textes sur les arbres avec Google translate ; Havre Saint Pierre; Sokodé ; Sept iles; Trois rivières; Kpalimé ; rivière du loup ; dis-moi c’qui s’passe à Trois rivières et à Québec ; quel rap dit le blues d’une jeune mère togolaise demandeuse d’asile ?


il fait déjà nuit ; c’est l’hiver ; trois marches pour atteindre le seuil ; certainement indiqué hôtel ; petit couloir étroit ; je reviendrai là ; escalier de bois ; murs escalier meubles tout est bleu ; la dame aussi en bleu ; là-haut la chambre ; un lit en fer une place ; pendre les affaires pour deux nuits ; redescendre au petit restaurant ; gargote nous disions ; trois tables carrées recouvertes de toile cirée bleue ; un tableau au mur pas vraiment droit ; un paysage banal de désert avec chameaux et palmiers ; une table est occupée ; deux hommes ; le seul souvenir précis ; la soupe chaude et l’omelette que va apporter la dame ; festin d’un soir ; de tous les soirs ; il n’est pas sûr qu’elle parle français je sais si peu d’arabe ; sourires et plaisir à la discussion de la table à côté ; quelques bruits de la rue par la porte entr’ouverte ; je vais marcher un peu seul ; il fait froid l’hiver la nuit sur les hauts plateaux ; un attroupement autour d’une discussion un peu vive ; des joueurs de domino autour d’un brasero ; manteaux lourds et sombres au-dessus des costumes ; capuches pointues ; je monte lentement voir la ville d’en-haut ; demain j’irai tôt rejoindre les stagiaires ; passerai à la librairie-papeterie-tabac-épicerie ; achèterai un des livres en français étonnamment là.

A propos de bernard dudoignon

Ne pas laisser filer le temps, ne pas tout perdre, qu'il reste quelque chose. Vanité inouïe.

7 commentaires à propos de “autobiographies #08 | surplomb”

    • Oui, vertige c’est le mot. Égaré ans le décalage horaire, les distances, les lieux évoqués pendant le zoom, ça m’a bien plu d’essayer de trouver des repères rassurants. Merci pour votre lecture.

    • Peut être parce que je suis à l’autre bout du monde, j’ai trouvé ce zoom tellement beau et riche ! Le même jour ou peut être avant, j’ai failli vous demander de m’asseoir avec Marion et Louise sur le douillet siège arrière mais je me suis dit qu’il était déjà bien encombré. Le voyage s’est bien passé ?

  1. « qu’il reste quelque chose. Vanité inouïe. »Alors des bribes et des points virgules. Un dernier paragraphe comme suspendu. Il y a un demain, bien sûr à la fin, mais dans l’attente, le temps s’étale entre les points virgules, et on imagine la lumière et un fond de gris au voyageur qui regarde la ville d’en haut. Et un petit vent frais aussi, entre les points virgules, ou du moins quelque chose qui fait frissonner. Bon voyage 🙂

    • Bonjour Marion,
      Trouvez-vous bien raisonnable de faire des commentaires plus beaux que les textes auxquels ils s’adressent ? Alors j’ai relu ce #8, regard de loin, ville vue du dessus. Ça me plait que ça vous fasse frissonner, je ne sais jamais si les mots que dicte mon imagination rétive sont compréhensibles, lisibles au minimum par une éventuelle lectrice. Bref, merci et bonne journée.

      • Et bien je vois ces commentaires, ces impressions de lecture comme des rêveries rebond, une rêverie rebondit sur une rêverie première et qui sait si ce petit mouvement ne viendra pas creuser d’autres sillons, ouvrir des impensés chez l’auteur de la rêverie première. Et si c’est le cas hop que l’on tape dans le mille et bien on est bien content. Bon on pourrait aussi causer participe passé ou point virgule, ça arrive aussi si c’est là ce que le texte déclenche. Ce n’est d’ailleurs pas moins intéressant, tout aussi personnel et intuitif.