Ça cogne

Ça cogne dans le dedans des joues. Ça a toujours cogné dans le dedans des joues.

Le sang, le vin, les mots cognent dans le dedans des joues. Ça ne se voit pas. A peine si ça s’entend. Des hiéroglyphes s’impriment pourpre dans le dedans des paupières. Ça se voit de l’intérieur. Ça m’appartient.

Je l’ai oublié. Le visage je l’ai oublié. Le visage n’est plus habité. Tu l’as déserté.

Il reste une tête. Les yeux sont fermés. La bouche est tordue sur un tuyau. L’immobile apparent tient le vif enfermé. Ça fuit.

C’est comment dans le dedans de tes oreilles. Ça s’est tu dans le dedans de tes oreilles. Le déroulement des jours s’en est arrêté à la lisière.

Cette tête m’encombre. Ce visage je ne le reconnais pas. Je ne veux pas le connaître. J’en épuise les dernières ressources. Les mots cognent dans le dedans silencieux de la bouche muette.

Arraché à l’été, le reste a disparu. La lumière aveuglante efface les directions et jusqu’au paysage de juillet. Plus rien n’accroche sur le dessus de la peau. Dehors c’est lisse. Ça cogne. La chaleur cogne.

A propos de Cécile Marmonnier

Elle s’appelle Sotta, Cécile Sotta. Elle a surtout vécu à Lyon. Elle a été ou aurait voulu être marchande de bonbons, pompier, dame-pipi, archéologue, cantinière, professeure de lettres certifiée. Maintenant elle est mouette et fermière. En vrai elle n’est pas ici elle est là-bas. Elle s’entoure de beaucoup de livres et les transporte avec elle dans un sac. Parfois dans un carton quand il ne pleut pas. Elle n’a pas assez d’oreilles pour les langues étrangères ni de mémoire sur son disque dur. Alors elle écrit. Sur des cahiers sur des carnets sur des bouts de papier en nombre. Et elle anime des ateliers d’écriture pour ne pas oublier de vivre ni d'écrire.