#P5 | Viscéral

ventre qui se tord en ver d’angoisse

Tout commence dans le ventre. C’est le signe de la fracture. Que plus rien ne va. C’est immédiat. Ca saisit. Ne laisse pas le choix. Hurle sans détour. L’angoisse se loge là où tout commence, au plus ombilical de l’être. Elle est viscérale. S’ingère, ne se digère pas, coupe l’appétit, nourrit de l’intérieur, dévore tout sur son passage. Prend toute la place. Ca crispe. Ca ravine. Aspire soi et le monde. On a beau faire. Dans le bide le ventre les entrailles les viscères, plus que la barre qui se tord et se tend. Intestins-vers qui rongent. Pierres de rate de foie d’estomac qui lestent et plombent. Plus rien d’autre n’existe. L’angoisse se diffuse, envahit le corps, démembre, anesthésie les sens, crispe les muscles. Abasourdit. Tête en étau. Dents serrées. Regard hagard happé dissout dans le bouillon de l’âme. Apnée du corps et de l’âme. Le temps que ça passe.

A propos de Émilie Marot

J'enseigne le français en lycée où j'essaie envers et contre tout de trouver du sens à mon métier. Heureusement, la littérature est là, indéfectible et plus que jamais nécessaire. Depuis trois ans, j'anime des ateliers d'écriture le mercredi après-midi avec une petite dizaine d'élèves volontaires de la seconde à la terminale. Une bulle d'oxygène !

8 commentaires à propos de “#P5 | Viscéral”

  1. Bonjour Emilie, votre texte est fort, vraiment, car difficile cette écriture qui nomme les parties du corps et ne se fait pas livre de bio,
    une petite remarque si je peux, celle de vous dire que vous pouvez garder jusque bout votre ligne, c’est à dire que les explications dans les deux ou trois dernières lignes cassent pour nous le rythme, en enlevant « c’est de là »  l’angoisse diffuse aussitôt – pour nous (elle était là déjà, rassurez vous), de même le « parfois c’est » affaiblie la boule, j’espère que ce regard ne vous dérange pas, j’enlève ce commentaire si c’est le cas, n’hésitez pas à me le dire, à bientôt avec vous pour les suites de l’été, Catherine

    • Merci merci Catherine de prendre le temps de cette lecture attentive ! Je prends bien au contraire ! D’autant que c’est fou (« truc de ouf »… dirait Cécile) : je m’aperçois que je suis de façon récurrente dans la phrase courte (souvent je réécris en élaguant pour ne garder que l’essentiel surtout qu’ici l’angoisse coupe la parole, l’asphyxie…) mais que la proposition m’invitait à entrer dans un processus plus explicatif. Maintenant que j’ai écrit je commence à lire les autres et je m’aperçois que oui en effet les fulgurances se déploient dans le 2ème texte et surtout que c’est efficace. Alors je poursuis la taille ça me va… Ce qui va donner…

      • Yo ! si efficace, et ce « temps que ça passe » qui claque la fin de partie ! Très chouette, et rien ne vous empêche de nourrir à nouveau le texte, par exemple en suivant la piste d’un sens (vue, ouïe, etc…), où tout autre chose qui enfle la chose, bonne suite,