Pomme noire

granuleuse/se ride/s’assèche et rétrécit/s’effondre sur elle-même/couleur violet-noir avec une pointe qui subsiste de rose qui vire au brun/mouvement de la matière retournant à la terre/couche brunâtre sur le dessus entre terre et lave séchée/

Vocabulaire spécifique :
la tige ou pédoncule
étamines (poils)/sépales (petites feuilles drues)
peau ou épicarpe
pulpe ou mésocarpe
coeur ou endocarpe
loge (avec pépins ou graines)

j’aime les pommes, j’aime la façon dont leur forme s’ajuste presque parfaitement à la paume ouverte de la main, j’aime ce bruit caractéristique qu’elles produisent quand on les croque, quand la pulpe se déchire, j’aime la texture rugueuse et lisse de leur peau, j’aime ce contraste entre peau épaisse et pulpe soyeuse, j’aime ce moment où par mégarde on croque dans un pépin et qu’un liquide amer parvient jusqu’à nos papilles nous faisant grimacer.

Sur mon bureau de bois brut, sur un coin, une pomme à la peau noircie. On la sent gonflée de l’intérieur, comme un cadavre gorgé d’eau. Sous une large tache brunâtre ressemblant à de la lave séchée ou à du métal rouillé, un peu de chair rosée résiste.

Granuleux et brunâtre, l’épicarpe se donne, avec ses vagues de lave refroidie qui se déploient sur le haut du fruit charnu, un air de terre. Sous la péliculle presque violette aux accents de corruption, on sent le mésocarpe flétri, s’effondrant lentement sur lui-même. Le pédoncule pourtant, continue valeureusement son érection vers le ciel tandis qu’une tâche rosâtre fleurit au sein de la chair encore vive du fruit.

je suis assise et mon corps oublie qu’il s’ennuie je suis à l’intérieur alors je mange une pomme des pommes d’un verger elles sont dans un filet je vérifie le filet je retire les pommes blettes j’en trouve une mais celle-là elle était noire même pour une compote c’était trop tard alors sur mon bureau c’est là qu’elle a fini parce qu’elle était belle c’est étonnant une pomme noire je voulais la voir changer se flétrir se rider puis diminuer rétrécir sécher et presque disparaître le spectacle de la vie qui s’évapore.

A propos de Sybille Cornet

Je n’ai pas de page Facebook ni perso ni privée. Ni d’instagram. Et pas de site non plus autour de mon travail. Je sais que question communication c’est pas top. Je vis mieux dans l’ombre. Mais je travaille à tenter d’en sortir. Je suis autrice et metteuse en scène. Principalement de théâtre jeune public. Le théâtre jeune public est un milieu qui vit un peu en autarcie. On se connait tous et toutes. Et donc la nécessité n’est pas forcément là pour me pousser dans le dos. J’ai une pièce de théâtre publiée Le genévrier chez Lansman. J’ai un texte publié dont je suis contente, une ode aux pieds nus (La matière du monde) édité chez Post industrial animism. J’ai publié des textes poétiques dans un magazine que j’adore et qui s’appelle Soldes almanach, magazine assez branque sur les nouvelles utopies. Il y a une adaptation sonore d'un spectacle performance sur le Syndrôme de Stendhal que j'ai écrit et performé ici : https://www.dicenaire.com/radioautresauborddumonde . Pour le reste, j’ai écrit et mis en scène une bonne dizaine de spectacles, adultes et enfants. Ma compagnie s’appelle Welcome to Earth. J’ai aussi fait un peu de poésie sonore. Pour l’instant je monte un spectacle pour tous petits qui raconte une amitié entre deux arbres, un petit pin nain et un bouleau. Ça s’appellera sans doute Inséparables. J’accompagne une actrice slameuse qui monte un seule en scène autour de sa grand-mère et de l’avortement. Le titre : Bête d’orage. Je fais partie d’une commission qui octroie des aides à la création aux créateurices jeune public et je lis beaucoup de dossiers d’artistes. Aussi étonnant que ça puisse paraître, ça me passionne complètement. Lire des dossiers d’intention de spectacles m’intéresse parfois plus que de voir le spectacle lui-même. J’étudie aussi la dramaturgie (mais ne me demandez par contre pas ce que c’est ok ?). Ah oui, je suis belge et je vis à Bruxelles, ville que j’aime entre toutes.