vers un écrire-film #03 | Loupiotte, immense et main

Loupiotte rouge

Une loupiotte rouge me dit occupé. Je voulais entrer. Mais porte fermée. Pas entrée. C’est pressant. Un peu contrarié je tente de deviner ce qui se passe à l’intérieur. Si c’est vraiment occupé ponctuellement ou si c’est indisponible complètement. Pour savoir si je dois attendre et combien de temps. Avec les équipements publics on ne sait jamais. Il est vrai que faire une fenêtre dans ce genre de batisse ne serait peut-être pas la meilleure idée. Elle doit garder son mystère. Elle doit rester une petite boite hermétique. À un moment la voilà qui se met à ronfler. Tout est possible mais je ne crois qu’elle se soit mise à dormir. Je pense plutot à un bruit d’automatisme. J’essaie d’être à l’intérieur par la pensée pour savoir quand même. J’en aurais trop besoin. Souvent il y a des systèmes de nettoyage automatique dans ces choses là. Je vois dans l’ombre des rouleaux qui tournent pour enlever la crasse. Je vois de la mousse pour digérer toute infection. Des souffleries pour pulvériser toute poussière. Mais de l’extérieur rien ne bouge. Je suis désespéré. Je sens que je vais renoncer. Encore plus mal à l’aise que quand j’ai commencé à attendre. La petite boite fait silence maintenant. La loupiotte rouge m’apparait de plus en plus brillante. J’attends de sa part un geste. Il n’y a plus qu’elle est moi.

Immense ciel bleu ensoleillé

Nous sommes comme jetés au dehors de la salle obscure. Aussitot c’est l’éblouissement. L’immensité du ciel bleu nous donne le tournis. Aussitot la chaleur du Soleil pourtant assez modérée en cette période nous réveille de notre engourdissement hivernal. La lumière impose ses violents contrastes. Nos yeux clignent. Mon amie regrette de ne pas pouvoir rester dehors avec moi et d’être obligée de retourner à l’intérieur. Elle me dit au revoir en jetant avec regret un oeil vers les terrasses de café si animées. Le plus cocasse est que la salle obscure en est vraiment une où elle joue sur scène avec un grand nuage noir de pacotille. Pacotille mais ça fait plusieurs jours qu’elle est avec un cumuloninbus. C’est rigolo de faire ça dans une toute petite salle alors que dehors l’immensité du ciel bleu est presque insultante. Elle ne trouve pas rigolo du tout qu’elle doivent retourner travailler alors que moi je vais profiter de ce fameux Soleil. Lui disant au revoir et la voyant disparaitre derrière la porte qu’elle referme. Profitant de ce ciel sans nuage en suivant les zones ensoleillées du trottoir.

Mains parlantes en cachette

Le trottoir se resserre. Se tient un groupe d’hommes à l’endroit le plus étroit. On est obligé de passer au milieu d’eux. Un de ces hommes me regarde dans les yeux. Il choppe mon attention. Tout de suite il regarde sa main en marmonnant arl oro arl oro arl oro. Je passe. Je le regarde. Je passe. Je regarde sa main qui montre quelque chose et tout de suite le cache. Arl oro arl oro arl oro. J’ai la tête un peu ailleurs. Il dit arl oro sur un ton de plus en plus insistant. Je finis par comprendre qu’ils vendent des cigarettes au noir. Je hausse les épaules. Nous sommes sur le trottoir du… palais de justice et déjà les trafiquants prospèrent. Je me dégage. Les hommes me suivent du regard tandis que leurs mains font disparaitre dans leurs poches les cigarettes. Je file.

Un commentaire à propos de “vers un écrire-film #03 | Loupiotte, immense et main”

  1. Délicieux instants racontés avec juste ce qu’il faut de distance et d’humour. On se dit qu’il faudrait toujours voir ainsi les choses. Merci