vers un écrire/film #06 | l’acrobate

La goutte de pluie me regarde. Goutte d’eau. Pluie. Elle a atterri sur la rambarde du balconnet et y reste plantée. Pas seule. Mais c’est elle seule qui me regarde. Il pleut. Sous l’effet de ses consoeurs qui louvoient tout autour puis tombent piteusement. Et du petit vent de septembre, elle perd de sa rondeur. Elle s’étire dangereusement, se tord translucidement, semble se renverser, se rétablit pataude et s’accroche à son mât. Tâche miroitante toute fiévreuse. Semblant désarçonnée. L’infime troublionne a plus d’un tour dans son sac. Elle se cramponne et me regarde en gigotant. Il pleut. Il bruine. Les nuages gonflés d’importance patinent sous le ciel sombre où pointe une trouée blue, museau blanchâtre dans tout ce gris. Les gouttes en sourdine floutent mon regard. Mais elle, sûrement avale mes regards et me les restituent. Sa solidité tremblée affiche de beaux restes puis s’évanouit.

A propos de Louise George

Diverses professions et celles liées au "livre" comme constantes.

14 commentaires à propos de “vers un écrire/film #06 | l’acrobate”

  1. Liquide et regard s’interpénètrent, la goutte prend vie : j’ en redemande.

    • Merci Bruno. Cette goutte est comme puce sauteuse. Qui sait où elle va bien vouloir se nicher…

  2. tu rends admirablement la scène, on la voit. Est-ce la goutte qui te regarde ou toi qui te vois dans la goutte et qui t’accroche ?
    j’enlèverais qq adverbes peut-être si tu permets.

    • Qui regarde qui … Bonne pioche. Pour les adeverbes, plutôt d’accord avec toi mais finalement, je les ai laissés car j’ai trouvé que lourds comme ils sont, ils allaient participer au ralentissement. Merci Danièle