zone hôtelière

Zone hôtelière

au bout de l’avenue de Saint-Ouen, il faut (il fallait) tourner à droite en descendant vers la porte – non à gauche -, gravir un plan incliné qui mène à l’entrée, là où les autobus déposent leurs sommités à trois cents francs la nuit – des cars entiers d’étrangers (même aujourd’hui, ceux-là, on les accepte, ceux-là sont les bienvenus, on ne les empêchera pas de venir, comme du côté de la vallée de la Roya, ou d’ailleurs, dans les neiges des Alpes, non, ceux-là sont les bienvenus) – même s’ils débarquent par cinquantaines, bien rangés, valises à roulettes et vêtements de saison – la navette (shuttle tu sais) les déposera là en provenance de la plate-forme directement l’ascenseur – l’entrée principale est protégée de la pluie d’une marquise de béton – prendre à droite, certainement pas par l’entrée principale, à droite contourner l’immeuble puis l’entrée des artistes – la porte de service – entrer se mettre en tenue (retenue sur la première paye – pantalon noir chemise blanche point barre) (contrat à durée déterminée renouvelable autant de fois que nécessaire – extras) (peut-être dix ou quinze fois, je ne sais plus exactement) le plan, je l’avait eu par le trompettiste de Concorde – on avait discuté, j’avais chanté, il accompagnait, on s’était retrouvés une autre fois à la Motte-Picquet, dans le couloir en rez-de-chaussée qui va à la ligne Nation/Étoile par Denfert – j’aimais ce lieu-là mais je préférais Palais-Royal – c’était plus près de chez moi – il y avait sur la petite place la vendeuse de violettes (elle devait dater du dix-neuvième siècle dans mon esprit), j’allais ensuite à La Comédie pour échanger la monnaie contre des billets boire un café avant de retraverser le fleuve déposer la caisse à la maison et courir vers Jussieu – ou pas – le trompettiste était noir, vivait à Villiers-le-Bel-Gonesse (c’est le nom de la gare, par celle du Nord) avec d’autres de ses amis ils faisaient un groupe mené par un type qui pondait musiques et paroles, il était aux claviers tandis que sa femme était au chant – j’avais la rythmique je pouvais faire des chœurs – on mangeait des sandwichs à l’œuf brouillé – on répétait chez eux – dans le groupe (sûrement ils avaient pris un nom mais je ne le sais plus) le trompettiste tenait la basse – il était déjà en tenue salut on allait prendre le service – céleri rémoulade poulet rôti purée salade crème caramel multiplié par deux cent cinquante – le moins de pain possible – la bière le vin l’eau – le mieux c’est le vin – en supplément – le sel et le poivre – les mains propres, les serviettes en tissu – servir et desservir – les assiettes sales sur les chariots – les couverts ici et les verres là – desservir servir – « si vous voulez mais c’est avec supplément » souvent ils n’y entravaient que pouic mais qu’est-ce que ça fait – tchécoslovaques yougoslaves autrichien.es japonais.es (pas de chinois.es encore) – couples âgés cinquante soixante – service fini vers onze on s’en va par le même chemin – métro changer aux Invalides – qu’est-ce que ça peut bien faire ? Du travail, la fiche de paye fin de mois, augmentée des pourboires (les groupes n’en donnaient jamais, on préférait ne pas être de groupes, mais l’hôtel les accueillait quand même) – quand on s’est entiché au début de ce siècle d’accueillir les jeux olympiques, tu parles d’une aubaine, on a détruit, là se trouvait l’emprise de la société de chemin de fer, laquelle a dû la céder – on va monter le village ici (non, ça ne s’est pas fait, non – mais ça va venir, toute honte bue) (les femmes de chambre y sont en grève, ces temps-ci, depuis vingt mois) les maréchaux à traverser, et on sera au nouveau tribunal – aujourd’hui l’ensemble du bloc est occupé par la préfecture de police (qu’ils ont localisée au 36 de la rue (du Bastion, certes, ça vous a une autre allure que le quai des Orfèvres) – tu vois comme c’est beau, le souvenir), – l’hôtel se cache derrière d’autres blocs, peut-être des immeubles d’habitations, on a offert/intitulé la rue qui les encercle à Gilbert Cesbron (« Chiens perdus sans collier »)

A propos de Piero Cohen-Hadria

(c'est plus facile avec les liens) la bio ça peut-être là : https://www.tierslivre.net/revue/spip.php?article625#nb10 et le site plutôt là : https://www.pendantleweekend.net/ les (*) réfèrent à des entrées (ou étiquettes) du blog pendant le week-end

6 commentaires à propos de “zone hôtelière”

  1. un hôtel ainsi aussi, moins prestigieux peut-être mais qui le voudrait, refuge pour des dîners qui prudemment voulaient des témoins, sur le quai de la Seine près du pont de Bougival (p

  2. (pardon mais la description des êtres débarqués avec leur valise a réveillé souvenir, et fait grimacer)
    mais les bouquets de violettes du Palais Royal, en ai tant offerts …

  3. je nous savais la connaître la petite marchande de violettes, là…(et le vendeur des 4 saisons de la rue Rambuteau avec sa charrette, non loin d’où se tient, aujourd’hui, Colette et ses cahiers…)

  4. (je n’y parviens pas moi-même alors…) mais merci d’essayer :°))

  5. Rétroliens : 2 – Aux aurores à Saint-Lazare (chagrin) – Tiers Livre, les ateliers d’écriture