A propos de Carine Colletin

Professeur d'anglais en exercice, lectrice avide depuis toujours, je suis entrée en écriture comme on entre en religion: avec ferveur et dévotion. Des écrits plein la tête et surtout l'envie de devenir un artisan, apprendre la patience, oser désosser les objets pour en comprendre le fonctionnement, tout en gardant la capacité d'émerveillement et la passion qui m'animent.

#enfances #02 | Une chambre

La chambre de mes parents a longtemps été au sous-sol de la maison familiale. Un jour, ils ne sont plus descendus. C’est venu progressivement. Sans que l’on puisse déterminer une date, un mois, ni même une année précise. A mesure que les corps se raidissaient, que les douleurs du vieil âge gagnaient la bataille. Et leur vie au rez-de chaussée Continuer la lecture#enfances #02 | Une chambre

#enfances #01 | Des amies.

Ma grand-mère est une tsarine, une impératrice. Elle se déplace suivie de sa cour. Des membres de la famille surtout, des figures de l’ombre un peu perdues sur terre, gauches, à demi- effacées. Qu’il faut bien ouvrir au monde. Mais le plus souvent c’est elle que l’on vient voir. Des amies, dont le séjour nous chasse temporairement du paradis de Continuer la lecture#enfances #01 | Des amies.

#enfances #00 | La mer, tout près.

L’enfance connaît la douce ivresse des choses rares. Celles qui n’arrivent qu’une fois. Par semaine. Par mois. Par an. Que l’on goûte avec son moi tout entier. Que l’on laisse fondre sur la langue pour qu’elles durent plus longtemps. Sur lesquelles on laisse courir une main curieuse. Que l’on capture dans des collections improbables. Jusqu’à la prochaine fois. L’enfant a Continuer la lecture#enfances #00 | La mer, tout près.

#été2023 #3bis | quatre par quatre

Quatre. Ils ne sont que quatre. Quatre à s’être retrouvés dans cette vilaine gargote, qui annonce pourtant crânement sur sa devanture Restaurant de la Plage. Deux femmes et deux hommes. Comme pour un double date, un rencard entre deux couples. Quatre. Assis deux à deux. Les deux hommes font face aux deux femmes. Les femmes tournent le dos à l’entrée Continuer la lecture#été2023 #3bis | quatre par quatre

#été2023 #03 | Stein

Comme je l’ai dit, Swann n’est pas un prénom que l’on oublie facilement. Je lui imagine des parents férus de littérature, ce qui n’est pas si fréquent chez nous. Des enseignants, peut-être. L’un d’eux, professeur de français probablement. Mais ce que les gens se rappellent sans aucun doute, à propos de Swann, ce sont ses yeux verts. Les gens d’ici Continuer la lecture#été2023 #03 | Stein

#été2023 #02bis | jokari

Après le centre-ville tout entortillé sur lui-même, mairie, église, cimetière, gendarmerie, la montée vient vite, brutale. Cà grimpe sec et ma voiture, qui aime filer sur les voies rapides de l’autre côté de l’île renâcle à emprunter les lacets serrés. Il faut garder le pied à l’accélérateur, tout en avançant prudemment. Les deux mains sur le volant. Etre prêt à Continuer la lecture#été2023 #02bis | jokari

#été2023 #02 | Du lieu au personnage

La porte d’entrée ne ressemble à rien de ce que l’on voit habituellement chez nous. Ce n’est pas non plus l’élégance subtilement ostentatoire des villas de magazines d’architecture ; la Sainte Trinité du design de luxe : Italie, Côte d’Azur, Californie. Au lieu de cela, cinq larges panneaux de bois brut, d’un brun riche, vivant.  A peine lasuré.  Pas de charnière visible, Continuer la lecture#été2023 #02 | Du lieu au personnage

#été2023 #01bis | scène originelle

L’histoire, Jeanne l’écrit une première fois, dans le silence angoissant d’après -midis trop longues. Une histoire avec queue et tête. Une scène capitale rédigée dans le noir, comme dans une transe. Un vertige, une tension intérieure. L’impression que quelque chose se passe. Que les idées se mettent en place. Ecrire ces mots venus de loin lui tire même des larmes. Continuer la lecture#été2023 #01bis | scène originelle

#été2023 #00 | prologue

J’ai douze, treize ou quatorze ans. Les genoux écorchés de l’enfance et le coeur ardent. Je lis tout et partout. La documentaliste du collège lève un sourcil intrigué en agrafant une deuxième fiche à la première qui recense les livres que j’ai empruntés depuis le début de l’année. Je voyage. Je vole. Impossible de me rappeler ce que j’ai ressenti Continuer la lecture#été2023 #00 | prologue

#été2023 #01 | Annie Dillard, commencer par inventer l’auteur

De mon lit à mon bureau il n’y a qu’un pas.Mon bureau est cet immense vaisseau sur lequel d’ailleurs est gravée la carte du monde. Du bois, lourd, poli, verni. Une grosse pièce exotique qui a dû traverser l’océan. Il fait face au mur blanc. Blanc comme ma feuille au commencement. Mon lit est un lagon reposant. Qui appelle mon Continuer la lecture#été2023 #01 | Annie Dillard, commencer par inventer l’auteur