autobiographies #07 | de porte en porte

1) 1er étage d’un immeuble Haussmannien, sur un palier feutré (moquette épaisse), sombre (sans fenêtre), spacieux (9m2), deux portes fermées se font face, au seuil de chacune d’elles, deux paillassons style tapis brosse (propre et classe) .

2) « La petite porte en bois » permet d’entrer dans le jardin, sortir dans la rue, sortir du jardin, entrer dans la rue. Elle est faite de 7 planches de bois de 11cm de large, espacées de vide de 5cm et hautes de 1m20. Elle claque derrière nous lorsqu’on ne la retient pas, un bruit sec et métallique celui du loquet sur la targette.

3) La porte de l’appartement de R rue de l’église, n’était jamais fermée à clé, jamais, pourtant elle était bien munie d’une serrure, je l’avais vérifiée. L m’avait confiée que depuis que R avait été enfermé 17 ans en prison en Pologne il était incapable de fermer sa porte à clé, incapable.

4) Son 1er achat immobilier était un studio, malgré la petite surface il lui importait d’avoir un coin nuit isolé alors elle avait imaginé une porte coulissante faite de quatre grandes vitres qui en journée laisseraient passer le plus de lumière possible. La structure en bois qui encadrait ces vitres elle l’avait peinte en rouge brique/terre de Sienne.

5) Le système de fermeture de la porte avant de la 2CV grise de ma grand-mère était monté à l’envers, il fallait lever la poignée et de l’intérieur donner un coup de coude juste sous la fenêtre et de l’extérieur tirer un coup sec pour faciliter l’ouverture de cette porte.

6) Porte saloon à 2 battants, on l’ouvre les bas chargés, d’un coup d’épaule, les coudes en avant, avec le pied, avec le genou plié devant, en faisant une rotation du bassin et d’un coup de fesse, tellement de manières: pratiques, élégantes, cavalières, évidentes, surprenantes, acrobatiques, maladroites et même spectaculaires pour franchir une porte western à 2 vantaux.

7) Chouette elle me ramène en voiture. On approche du lieu de stationnement, elle pointe du doigt une voiture et me dit voilà c’est la blanche. Sans sortir de clé, les portes s’ouvrent toutes seules, je m’étonne, elle m’apprend qu’aujourd’hui c’est comme ça, les voitures neuves s’ouvrent en détectant simplement le bip dans le sac ou dans la poche. Ah bon? Ça alors? Et je me prends à imaginer que bientôt, si ça se trouve, il n’y aura même plus de porte.

8) La porte d’un décor de théâtre, elle ne mène nulle part, enfin seulement en coulisse, couloir étroit simplement éclairé par une lampe bleue.

9) Château de Fontainebleau, à l’entrée de la chapelle, une porte monumentale, en bois sculpté, marron foncé, en relief, des têtes d’hommes barbus, chevelus, bouches ouvertes, sourires grimaçants, visages déformés, expressions figées: des figures comme des masques.

10) A côté d’un bar, une porte d’immeuble légèrement en retrait, régulièrement les hommes y pissent.

A propos de Cécile Bouillot

Bonjour je suis comédienne. Je développe également des projets vidéos dans lesquels je filme les gens autour d'une même question. J'écris des poèmes de rue a partir de phrases récoltées dans la rue, j'aime m'amuser avec différents jeux d'écriture, j'écris régulièrement depuis deux ans. Acte 2 Scène 2. Chaine Youtube : https://www.youtube.com/user/cecilebouillot

3 commentaires à propos de “autobiographies #07 | de porte en porte”

  1. … un style pour chacune – la 3 et la 10 donnent envie de les pousser avec des mots. Merci.

  2. Hello Cécile, plaisir de te retrouver à travers tes textes. J’aime ces portes pour lesquelles il faut se tortiller ou celles qui s’ouvrent toutes seules.

    Surprise de lire celle du château de Fontainebleau…
    C’est là où j’habite – Pas au château mais cela ne me dérangerait pas !!!

    Entre chez moi et chez toi, on trouvera bien un moment pour se rencontrer. Je travaille beaucoup en ce moment mais je vais venir plus régulièrement sur Paris à partir de Janvier. Je te tiens au courant.