hors-série #2 | Gitane maïs

Posée sur la margelle du puits quand on abreuve les bêtes, c’est une danseuse cassée, brin de paille tout sec, viendra se ficher seule toute la journée entre les dents, saignant son jaune sur le tracteur qui tremble, c’est un cerf, un cygne entier, poitrail gorgé de brume, danse dans les narines de pépé, fine poussière de miettes, craquent les Continuer la lecturehors-série #2 | Gitane maïs

hors-série #2 | la politesse du revolver

Le ventre poli de la crosse. Tout rond. Presque doux. Presque discret. Qui se la raconte pas. Poli quoi. Si seulement il n’était pas accroché là. On ne parlerait pas de lui comme ça. Il pourrait partir et tout recommencer. Il pourrait avoir une vie à lui. Une vie dans des galeries. Pourquoi pas ? Détaché du reste, il pourrait faire Continuer la lecturehors-série #2 | la politesse du revolver

hors-série #2 | les chaussures et les livres

Sur les chaussures, il n’y a presque à rien dire, parce que du moment qu’elles sont confortables et pas trop laides, on n’y pense plus ; elles accomplissent leur tâche dignement, discrètes, silencieuses – celles qui craquent ou qui grincent sont immédiatement mises à l’index des chaussures. Elles garantissent aussi confort et pieds secs, une chaleur toute douce les jours d’hiver. Continuer la lecturehors-série #2 | les chaussures et les livres

hors-série #2 | l’Objet du jour

20211006_112053.m4a Si l’on devait en célébrer, hésitation entre tourne-disque, vélo, fusée. Alors, tout simplement : le lit ! Ô matelas : a-t-on chanté assez tes douceurs inconnues, tes chastes rebondis, tes langueurs océanes ? Ô drap ! A-t-on assez loué ton fin tissé de fils, tes senteurs de lilas, ton lissé impeccable ? A-t-on assez narré pour quels voyages embarqué, l’Homme se déleste de son corps Continuer la lecturehors-série #2 | l’Objet du jour

hors-série #2 | le pied à coulisse

Tête et bec, le pied à coulisse a tout du héron. Il somnole dans son boîtier en hêtre, l’oeil horizontal mi-clos – à moins qu’il ne guigne la main prête à le saisir ? Saisissez-le : s’il ne se défend guère, ses arêtes métalliques ne portent pas à sourire ; l’acier froid, la lourde tête, l’oeil nictitant, tout vous parle d’un office sérieux : Continuer la lecturehors-série #2 | le pied à coulisse

hors-série #2 | les torchons de ma mère

J’utilise les torchons de ma mère. Je n’en ai jamais retrouvé de la même qualité. Solfin, c’est leur marque : en coton épais ou fin, en lin, nid d’abeille ou lisse, quadrillé ou juste bordé d’un liséré de couleur, de couleur ou blanc, j’en ai toute une collection ; les torchons de ma mère serviront encore à ma fille. C’est le seul Continuer la lecturehors-série #2 | les torchons de ma mère

hors-série #2 | la lampe

Elle est toujours posée sur la table. Parfois isolée, souvent entourée d’autres objets, vis-à-vis desquels elle occupe une place antérieure, prééminente: à fois la première et la dernière. Elle est l’objet qui restera quand tout ce qui encombrait la table aura été débarrassé. Aux côtés du chat, lui-même quelquefois assis sur la table, elle apparaît de taille modeste, petite comme Continuer la lecturehors-série #2 | la lampe

hors-série #2 | la spatule de cuisine ajourée

C’est une main aux doigts rigides et naïfs, dont l’empan fait l’exacte largeur de ma paume, mais elle est plus intelligente que la mienne car elle possède dans sa semelle en inox cinq interstices d’égale longueur, sertis d’une bride arrondie et pleine, qui lui permet de travailler à des tâches culinaires que je ne pourrais pas accomplir moi-même (la nature Continuer la lecturehors-série #2 | la spatule de cuisine ajourée

hors-série #2 | essuie-tout

Essuie-tout à l’appellation qui diffère selon le pays. Qui porte le nom de la marque plutôt que celui de sa fonction comme une victoire de la commercialisation sur son usage. Essuie-tout, ce qui est mouillé, renversé ou qu’on refuse de toucher. Il est là, il s’interpose, évite le contact direct depuis la chair des doigts, les gardera propres. Une sorte Continuer la lecturehors-série #2 | essuie-tout

hors-série #2 | Et partir en fumée

Ça faisait longtemps que je n’avais plus de place dans sa vie et puis, un jour, elle m’a repris. Mais elle a honte de moi et elle me cache. Difficile de rendre attrayant un objet, moi, portant en gros comme inscription bien voyante dessus « FUMER TUE », sans compter les photos bien glauques et les effets sur la santé de ceux Continuer la lecturehors-série #2 | Et partir en fumée