#enfances #05 | Tesselles

Des tesselles du passé dénicher une collection de grains de vie sur une carte d’intensités, le tout recousu de fils dorés.

Oscillation du petit tamis, en mouvements vifs et horizontaux, pour séparer les gros grains des petits, puis les doigts sur ce front de sable doux, et plus tard le nommer geste d’ange.

Vers l’amont, vers l’aval de la rivière qui dévale, le regard de l’un à l’autre : ressentir que tout cela est plus grand que soi.

Les pieds sertis dans la cupule du rocher de granite, les doigts enroulés aux cheveux de lichen, scruter l’autre versant jusqu’à la lisière de l’au-delà.

À la marge de l’après-orage, quand les pieds sur le seuil, et le regard vaporeux, quelque chose infuse de la terre mouillée.

Les nuits d’août, se tenir à l’affût, en famille, du passage d’étoiles filantes, et du vœu qui se disait à l’intérieur de soi.

Guetter la borne délimitant les départements, puis l’arrivée dans le village de Lozère où tout avait commencé.

Certains dimanches matins avec la main glissée dans celle du père, cheminer fièrement.

La première fois le train, et pouvoir dire après, comme tout le monde, je suis partie en vacances au bord de la mer

La voix de la mère qui démarrait tout doucement, s’élevait puis prenait de l’ampleur et les mots en italien: catari catari, et les frissons

L’argent des étrennes reçu et les réflexions d’un achat libre de choix.

L’émerveillement quotidien que fut la lecture, et la découverte de mots nouveaux aussitôt recherchés entre les pages du dictionnaire.

Cette sensation immense en seconde d’être un être pensant et de devenir quelqu’un

A propos de Solange Vissac

Entre campagne et ville, entre deux livres où se perdre, entre des textes qui s'écrivent et des photos qui se capturent... toujours un peu cachée... me dévoilant un peu sur mon blog jardin d'ombres.

3 commentaires à propos de “#enfances #05 | Tesselles”

  1. « le geste de l’ange… catari catari… cette sensation immense d’être un être pensant  » Merci Solange

  2. quelle belle galerie de sensations
    en commun avec toi, la présence de l’eau, mer et rivière… et puis l’orage

    je garde en moi : « ressentir que tout cela est plus grand que soi »

  3. délicieuses tesselles et celles qui me font un clin d’oeil comme la terre après l’orage… la main dans celle du père et la découverte de la lecture (mais pas celle de se sentir devenir quelqu’un, toujours pas arrivée à..)